Réalisation : Nicolas Koutsikas, Eric Nadler, Bob Coen
25/02/2014
Source : http://www.arte.tv
Source : http://future.arte.tv
English : Chemical weapons under the sea
Cachées depuis des décennies, les décharges d'armes chimiques sous-marines livrent un peu de leur secret grâce à cette enquête : un scandale militaire hérité de deux guerres mondiales et une véritable menace pour l'homme et pour l'environnement.
Plus d'un million et demi de tonnes d'armes chimiques non utilisées gisent sur les fonds marins de la planète. Encore s'agit-il d'une estimation, puisque le secret défense qui les entoure à travers le monde empêche toute évaluation précise. Les poisons qu'elles contiennent (gaz moutarde, gaz sarin, arsenic...) s'échappent lentement, inexorablement, des fûts corrodés par des décennies d'immersion. Ces armes sont l'un des terribles héritages des deux guerres mondiales. Jusqu'au début des années 1970, avec un pic entre 1917 et 1945, les armées des grandes puissances ont systématiquement déversé leur arsenal chimique quasi indestructible au fond des mers, dans les lacs ou l'ont enterré. À la conférence de Potsdam, en 1945, les Alliés rassemblent l’ensemble des armes chimiques collectées chez les belligérants et les immergent en mer Baltique, dans l'Atlantique Nord, dans l'Adriatique et dans la Méditerranée (non loin de Saint-Tropez notamment). Les fonds marins au large du Japon et des États-Unis, ainsi que l'océan Indien, sont également concernés.
Bombes à retardement
Des documents déclassifiés et des recherches indépendantes, sur fond de progrès scientifique et technologique, ont permis de lever une part du secret qui entoure ces décharges. Depuis quelques années, en Italie, en Allemagne, aux États-Unis, au Canada ou au Japon, des individus se battent pour localiser et éliminer ces bombes à retardement. Mais les obstacles sont colossaux : la dissimulation et l’imprécision des archives, le secret militaire, le coût des opérations de nettoyage et la crainte de nuire à la pêche ou au tourisme. Il est donc difficile d'évaluer l’ampleur de la menace qui pèse sur les populations et sur les écosystèmes, d’autant que les États font la sourde oreille. L'espoir vient d'une poignée de scientifiques qui ont saisi l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques afin qu'elle s'empare du problème. Ce documentaire captivant, nourri d’interviews et d'images d'archives, passe en revue les zones à risque et montre que des solutions sont possibles pour nettoyer les décharges. À condition que les États acceptent d'y mettre le prix.
Repères historiques
22 avril 1915 : L’Armée allemande fut la première à lancer une offensive chimique d’envergure, lors de la 2ème bataille d’Ypres en Belgique, en utilisant un gaz chloré.
1917 : Le gaz moutarde devient le « roi des gaz de combat ».
2 décembre 1943 : Début de la plus grande catastrophe chimique en Europe : 105 bombardiers de la Luftwaffe coulent 27 navires américains dans le port de Bari, dont « Le John Harvey », qui transportait une cargaison secrète de 2000 bombes de gaz moutarde. Pour éviter d’offrir aux Allemands une grande victoire sur le terrain de la propagande, les Alliés décident de garder le secret sur la nature des armes. Des centaines de civils italiens ne reçoivent alors aucun traitement lorsque le nuage de gaz envahit leur ville…
17 juillet - 2 août 1945 : à la conférence de Potsdam, les Alliés victorieux concluent un accord : ils se répartissent les stocks de toutes les armes chimiques et décident de les déverser en mer. à l’époque, cette solution paraît la plus simple et la plus sûre. Des immersions d’armes chimiques ont eu lieu en mer du Japon, dans l’océan Indien, en mer Baltique, en mer du Nord, dans l’Atlantique Nord, au large de la Côte d’Azur, en France et au large des côtes américaines et canadiennes.
1970 : Fin des versements en mer des armes chimiques.
1972 : Une loi du Congrès américain interdit le déversement d’armes chimiques en mer.
13 janvier 1993 : Signature à Paris de la Convention sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi des armes chimiques et sur leur destruction. Elle est entrée en vigueur le 29 avril 1997.
2005 : Début de la construction du gazoduc Nord Stream, qui révèle au grand jour la présence des armes chimiques dans la mer Baltique.
11 octobre 2013 Le prix Nobel de la Paix est décerné à l’Organisation pour l’Interdiction des Armes Chimiques. Créée en 1997, elle a supervisé la destruction de 80% des stocks d’agents chimiques déclarés (environ 60 000 tonnes), ainsi que près de 60% des 8 millions de munitions.
12 décembre 2013 : L 'ONU confirme l'utilisation d'armes chimiques en Syrie. Aux termes de la résolution, toutes les armes chimiques syriennes doivent être détruites avant le 30 juin 2014.
2017 : Date de la levée du secret d’état concernant les immersions en mer aux états-Unis et en Grande-Bretagne.
Les principaux gaz utilisés
De nombreux produits toxiques ont été employés dans les armes chimiques. Ces produits se présentent généralement sous forme de gaz ou d’aérosols largués dans des bombes ou pulvérisés par des avions spécialement équipés.
Parmi les principaux :
L’Arsine ou le trihydrure d’arsenic
Un gaz incolore et toxique, plus lourd que l’air, utilisé par l’armée allemande, en association avec d’autres gaz, dans les obus chimiques de la Première Guerre mondiale. Diffusé en aérosol assez fin pour passer la barrière des filtres des masques à gaz, il forçait les soldats à tousser, éternuer ou vomir. Poussés à ôter leur masque, ils respiraient alors d'autres gaz mortels libérés par les obus. Dans la mer, les armes chimiques à base d’arsenic se décomposent en arsenic inorganique, qui est toxique.
Le chlore
Utilisé lors de la première attaque chimique en 1915, le chlore est un puissant agent irritant qui peut infliger des dégâts aux yeux, au nez, à la gorge et aux poumons. À haute concentration, il peut causer la mort par asphyxie.
Le gaz moutarde
Il s’attaque à tous les organes du corps, provoquant de fortes brûlures, notamment aux yeux, menant à la cécité. Jusqu’à dix jours après l’exposition, les poumons peuvent être atteints : toux, inflammation, saignements, puis apparition de lésions alvéolaires entrainant une détresse respiratoire, un oedème pulmonaire et la mort. Dans la mer, le gaz moutarde se décompose en soufre, carbone et hydrogène, des éléments chimiques relativement inoffensifs.
Le Sarin
Découvert en 1939 par trois chercheurs allemands à la recherche de meilleurs pesticides, le gaz sarin est une substance inodore, incolore et volatile. Même à très faible dose, ce neurotoxique peut être fatal pour l’homme et l’animal.
Le Tabun
Découvert par hasard en Allemagne en 1936 par Gerhard Schrader, c’est un gaz à action rapide, inodore et incolore, qui s'attaque au système nerveux et respiratoire.
CARTES DES VERSEMENTS EN MER D'ARMES CHIMIQUES :
EUROPE :
NORTH EUROPE :
SOUTH ITALIA / FRANCE :
SOUTH ASIA :
JAPAN / KOREA :
NORTH UNITED STATES OF AMERICA :
PACIFIC :
La pollution de la mer Baltique
Le développement du trafic maritime est néfaste pour l’environnement, et la Baltique est déjà l’une des mers les plus polluées de la planète. En effet, l’intensité du trafic maritime favorise les accidents de navire (matérialisés par des points rouges sur la carte). Ainsi, plus de 700 barils de pétrole en moyenne sont déversés dans la Baltique chaque année. Ensuite, les fonds marins de la Baltique contiennent des milliers de tonnes de munitions et d’armes chimiques, déversées à la fin de la Seconde Guerre mondiale, dans les zones cerclées de bleu clair sur la carte.
Source : http://ddc.arte.tv/nos-cartes/mer-baltique-la-mediterranee-du-nord
25/02/2014
Source : http://www.arte.tv
Source : http://future.arte.tv
English : Chemical weapons under the sea
Cachées depuis des décennies, les décharges d'armes chimiques sous-marines livrent un peu de leur secret grâce à cette enquête : un scandale militaire hérité de deux guerres mondiales et une véritable menace pour l'homme et pour l'environnement.
Plus d'un million et demi de tonnes d'armes chimiques non utilisées gisent sur les fonds marins de la planète. Encore s'agit-il d'une estimation, puisque le secret défense qui les entoure à travers le monde empêche toute évaluation précise. Les poisons qu'elles contiennent (gaz moutarde, gaz sarin, arsenic...) s'échappent lentement, inexorablement, des fûts corrodés par des décennies d'immersion. Ces armes sont l'un des terribles héritages des deux guerres mondiales. Jusqu'au début des années 1970, avec un pic entre 1917 et 1945, les armées des grandes puissances ont systématiquement déversé leur arsenal chimique quasi indestructible au fond des mers, dans les lacs ou l'ont enterré. À la conférence de Potsdam, en 1945, les Alliés rassemblent l’ensemble des armes chimiques collectées chez les belligérants et les immergent en mer Baltique, dans l'Atlantique Nord, dans l'Adriatique et dans la Méditerranée (non loin de Saint-Tropez notamment). Les fonds marins au large du Japon et des États-Unis, ainsi que l'océan Indien, sont également concernés.
Bombes à retardement
Des documents déclassifiés et des recherches indépendantes, sur fond de progrès scientifique et technologique, ont permis de lever une part du secret qui entoure ces décharges. Depuis quelques années, en Italie, en Allemagne, aux États-Unis, au Canada ou au Japon, des individus se battent pour localiser et éliminer ces bombes à retardement. Mais les obstacles sont colossaux : la dissimulation et l’imprécision des archives, le secret militaire, le coût des opérations de nettoyage et la crainte de nuire à la pêche ou au tourisme. Il est donc difficile d'évaluer l’ampleur de la menace qui pèse sur les populations et sur les écosystèmes, d’autant que les États font la sourde oreille. L'espoir vient d'une poignée de scientifiques qui ont saisi l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques afin qu'elle s'empare du problème. Ce documentaire captivant, nourri d’interviews et d'images d'archives, passe en revue les zones à risque et montre que des solutions sont possibles pour nettoyer les décharges. À condition que les États acceptent d'y mettre le prix.
Repères historiques
22 avril 1915 : L’Armée allemande fut la première à lancer une offensive chimique d’envergure, lors de la 2ème bataille d’Ypres en Belgique, en utilisant un gaz chloré.
1917 : Le gaz moutarde devient le « roi des gaz de combat ».
2 décembre 1943 : Début de la plus grande catastrophe chimique en Europe : 105 bombardiers de la Luftwaffe coulent 27 navires américains dans le port de Bari, dont « Le John Harvey », qui transportait une cargaison secrète de 2000 bombes de gaz moutarde. Pour éviter d’offrir aux Allemands une grande victoire sur le terrain de la propagande, les Alliés décident de garder le secret sur la nature des armes. Des centaines de civils italiens ne reçoivent alors aucun traitement lorsque le nuage de gaz envahit leur ville…
17 juillet - 2 août 1945 : à la conférence de Potsdam, les Alliés victorieux concluent un accord : ils se répartissent les stocks de toutes les armes chimiques et décident de les déverser en mer. à l’époque, cette solution paraît la plus simple et la plus sûre. Des immersions d’armes chimiques ont eu lieu en mer du Japon, dans l’océan Indien, en mer Baltique, en mer du Nord, dans l’Atlantique Nord, au large de la Côte d’Azur, en France et au large des côtes américaines et canadiennes.
1970 : Fin des versements en mer des armes chimiques.
1972 : Une loi du Congrès américain interdit le déversement d’armes chimiques en mer.
13 janvier 1993 : Signature à Paris de la Convention sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi des armes chimiques et sur leur destruction. Elle est entrée en vigueur le 29 avril 1997.
2005 : Début de la construction du gazoduc Nord Stream, qui révèle au grand jour la présence des armes chimiques dans la mer Baltique.
11 octobre 2013 Le prix Nobel de la Paix est décerné à l’Organisation pour l’Interdiction des Armes Chimiques. Créée en 1997, elle a supervisé la destruction de 80% des stocks d’agents chimiques déclarés (environ 60 000 tonnes), ainsi que près de 60% des 8 millions de munitions.
12 décembre 2013 : L 'ONU confirme l'utilisation d'armes chimiques en Syrie. Aux termes de la résolution, toutes les armes chimiques syriennes doivent être détruites avant le 30 juin 2014.
2017 : Date de la levée du secret d’état concernant les immersions en mer aux états-Unis et en Grande-Bretagne.
Les principaux gaz utilisés
De nombreux produits toxiques ont été employés dans les armes chimiques. Ces produits se présentent généralement sous forme de gaz ou d’aérosols largués dans des bombes ou pulvérisés par des avions spécialement équipés.
Parmi les principaux :
L’Arsine ou le trihydrure d’arsenic
Un gaz incolore et toxique, plus lourd que l’air, utilisé par l’armée allemande, en association avec d’autres gaz, dans les obus chimiques de la Première Guerre mondiale. Diffusé en aérosol assez fin pour passer la barrière des filtres des masques à gaz, il forçait les soldats à tousser, éternuer ou vomir. Poussés à ôter leur masque, ils respiraient alors d'autres gaz mortels libérés par les obus. Dans la mer, les armes chimiques à base d’arsenic se décomposent en arsenic inorganique, qui est toxique.
Le chlore
Utilisé lors de la première attaque chimique en 1915, le chlore est un puissant agent irritant qui peut infliger des dégâts aux yeux, au nez, à la gorge et aux poumons. À haute concentration, il peut causer la mort par asphyxie.
Le gaz moutarde
Il s’attaque à tous les organes du corps, provoquant de fortes brûlures, notamment aux yeux, menant à la cécité. Jusqu’à dix jours après l’exposition, les poumons peuvent être atteints : toux, inflammation, saignements, puis apparition de lésions alvéolaires entrainant une détresse respiratoire, un oedème pulmonaire et la mort. Dans la mer, le gaz moutarde se décompose en soufre, carbone et hydrogène, des éléments chimiques relativement inoffensifs.
Le Sarin
Découvert en 1939 par trois chercheurs allemands à la recherche de meilleurs pesticides, le gaz sarin est une substance inodore, incolore et volatile. Même à très faible dose, ce neurotoxique peut être fatal pour l’homme et l’animal.
Le Tabun
Découvert par hasard en Allemagne en 1936 par Gerhard Schrader, c’est un gaz à action rapide, inodore et incolore, qui s'attaque au système nerveux et respiratoire.
CARTES DES VERSEMENTS EN MER D'ARMES CHIMIQUES :
EUROPE :
NORTH EUROPE :
SOUTH ITALIA / FRANCE :
SOUTH ASIA :
JAPAN / KOREA :
NORTH UNITED STATES OF AMERICA :
PACIFIC :
La pollution de la mer Baltique
Le développement du trafic maritime est néfaste pour l’environnement, et la Baltique est déjà l’une des mers les plus polluées de la planète. En effet, l’intensité du trafic maritime favorise les accidents de navire (matérialisés par des points rouges sur la carte). Ainsi, plus de 700 barils de pétrole en moyenne sont déversés dans la Baltique chaque année. Ensuite, les fonds marins de la Baltique contiennent des milliers de tonnes de munitions et d’armes chimiques, déversées à la fin de la Seconde Guerre mondiale, dans les zones cerclées de bleu clair sur la carte.
Source : http://ddc.arte.tv/nos-cartes/mer-baltique-la-mediterranee-du-nord
Documentaire de Nicolas Koutsikas, Eric Nadler et Bob Cohen (France 2013, 88mn)
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