27 avril 2014

6 avril 2014

2 avril 2014

27 mars 2014

23 mars 2014

14 mars 2014

Terres rares La high-tech à quel prix ?

Documentaire de Christian Schidlowski
Source : http://www.arte.tv
Source : http://future.arte.tv
01/2014
English : Rare earth high-tech at what price ?

Durant des siècles, néodyme, yttrium ou lanthane paraissaient sans valeur. Aujourd'hui, ces métaux appelés terres rares sont indispensables à la fabrication des smartphones, éoliennes et autres véhicules hybrides. Mais leur extraction demeure coûteuse et polluante.

Smartphones, éoliennes, véhicules hybrides ou électriques, toutes les technologies qui nous entourent contiennent des terres rares. Durant des siècles, néodyme, yttrium, dysprosium ou lanthane paraissaient sans valeur ; nous ignorions tout de leurs propriétés – et même jusqu’à leur existence. Aujourd’hui, ce groupe de métaux difficiles à détecter constitue une matière première plus précieuse que le pétrole et représente un marché juteux, en particulier pour la Chine qui extrait la quasi-totalité de ces minerais indispensables à notre avenir.  Mais les processus de séparation pour obtenir des métaux de grande pureté demeurent énergivores et extrêmement polluants – et produisent pour certains des déchets radioactifs. Un comble, lorsqu’on sait que la plupart des énergies renouvelables ont recours aux terres rares… Pourtant, personne ne semble prêt à y renoncer : les chercheurs se mettent ainsi en quête de moyens d’extraction plus propres, ou de procédés de recyclage des terres rares contenues dans les déchets industriels. De la Chine à la Saxe, en passant par la mine de Mountain Pass en Californie, ce documentaire dévoile les enjeux environnementaux, économiques et technologiques de cette industrie en plein essor.


 

La marche triomphale des terres rares

La première des terres rares a été découverte il y a plus de 200 ans. Mais ce n’est qu’avec la révolution numérique qu’elles sont devenues des ressources convoitées. Et notre consommation de terres rares continuera d’augmenter à l’avenir.
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Comment l’argent vogue de paradis fiscaux en fondations opaques, grâce à Ikea

Par
26/02/2014
Source : http://www.bastamag.net
English : How the money vogue of tax havens in foundations opaque, thanks to Ikea

Des holdings, des fondations et des filiales dans le monde entier, enchevêtrées dans une structure complexe. Les dirigeants de la multinationale suédoise Ikea cultivent soigneusement l’opacité et la dissimulation. Et ont un faible pour les paradis fiscaux et les montages financiers qui permettent « l’optimisation » fiscale : éviter le plus possible de s’acquitter de l’impôt. Petite plongée dans les ramifications de ce labyrinthe, bien loin des idées philanthropiques affichées par ses fondateurs.

Une petite balade chez Ikea pour moderniser votre cuisine, ou meubler votre nouvel appartement ? Votre déambulation dans l’un des 29 magasins géants que compte l’Hexagone se soldera par un chèque qui grèvera peut-être votre budget vacances. Mais consolez-vous, votre argent, lui, va voyager : un aller simple pour les Pays-Bas, une halte au Luxembourg, un passage au Liechtenstein, peut-être même un séjour ensoleillé aux Antilles néerlandaises. Pour atterrir en Suisse, dans la poche de son fondateur Ingvar Kamprad, dont le groupe, aux multiples ramifications, se sera acquitté d’une fiscalité minime. Tel est le complexe circuit que décrypte un rapport publié par Attac Allemagne sur la multinationale d’origine suédoise.

En juillet dernier, Ikea a carrément refusé d’être auditionné par la mission d’information de l’Assemblée nationale sur l’optimisation fiscale des entreprises, tout comme Apple et Facebook. Car le géant suédois du meuble cultive l’opacité. Son concept ? Tiroirs à double-fond, placards secrets et labyrinthe fiscal. Derrière la marque, se cachent en effets plusieurs holdings, des fondations, et une foule de filiales. Un organigramme très complexe, composée de branches implantées à travers toute l’Europe, au Liechtenstein ou au Luxembourg. Ce qui permet au groupe de pratiquer l’optimisation fiscale à grande échelle, estime Attac Allemagne. Un labyrinthe bien plus compliqué que la promenade fléchée imposée aux clients de ses magasins.

Une fortune installée en Suisse


Le fondateur d’Ikea, Ingvar Kamprad, utilise d’abord une astuce évidente pour payer moins d’impôts : vivre en Suisse. L’entrepreneur aujourd’hui âgé de 88 ans s’y est installé il y a plusieurs décennies. Pratique, pour l’une des plus grandes fortunes du monde (selon le classement établi par Forbes). Certes, officiellement, Ingvar Kamprad n’est plus propriétaire d’Ikea. L’octogénaire n’est plus à la tête du groupe depuis 1988 et a quitté la présidence de son conseil de surveillance en 2006. Mais, il reste « conseiller principal » du conseil de surveillance de l’un des holdings du groupe, Ingka, où il a aussi placé ses fils. « Dans les faits, il contrôle le groupe par le biais de l’une des sociétés d’Ikea, Inter Ikea, de manière indirecte mais toujours effective et autocratique », souligne le rapport d’Attac.

Inter Ikea est l’un des trois holdings qui composent le groupe. Mais celui qui se trouve en haut de la pyramide, c’est Ingka, société mère de tout le reste, qui a son siège aux Pays-Bas. Or, ce holding est détenu à 100% par une fondation, la Stichting Ingka, elle aussi de droit néerlandais. Une fondation à la tête d’un groupe qui réalise 28,5 milliards d’euros de chiffres d’affaires ? [1] Le modèle semble pour le moins original ! Il permet au fondateur d’Ikea de se prémunir contre une reprise de la société par des acheteurs extérieur. Mais il semble bien qu’il protège aussi du fisc.

Une première fondation basée aux Pays-Bas


En tant que fondation, la Stichting Ingka est considérée comme une structure à but non lucratif. « Comment la direction d’un fabricant de meubles peut-être une activité d’intérêt général, cela reste le secret de l’autorité fiscale néerlandaise », s’interroge Attac. Proposer des meubles pas chers et inciter des millions de personnes à s’initier au bricolage relèvent peut-être de l’intérêt général... La fondation Ingka affiche en tout cas un patrimoine de 36 milliards d’euros, ce qui en fait l’une des plus riches du monde.

« Aux Pays-Bas, les revenus d’une fondation de bienfaisance qui proviennent d’une activité d’entreprise sont soumis à l’impôt sur les sociétés, explique Karl-Martin Hentschel, auteur du rapport. Mais cela ne vaut pas pour les autres revenus de placements et du patrimoine de la fondation, soit vraisemblablement 17,9 milliards d’euros de liquidité et de titres pour la fondation Ingka. » Autre conséquence du modèle de la fondation, qui renforce encore un peu plus l’opacité sur les finances d’Ikea : « La fondation Ingka n’est pas obligée de publier un bilan annuel. A ce niveau là aussi, il y a dissimulation. »

Une seconde fondation au Liechtenstein


Dans les faits, c’est une autre fondation, détenue et financée par la première, la fondation Ikea, qui met en œuvre les activités philanthropique du groupe. Les fonds de la fondation mère Ingka ne sont ainsi « utilisables que de deux manières : soit ils sont réinvestis dans le groupe Ikea, soit ils sont donnés à des fins philanthropiques via la fondation Ikea », précise le site français du fabricant de meuble. Une troisième fondation, Imas, a, elle, pour fonction de gérer le patrimoine financier d’Ingka. Viennent ensuite les filiales de la holding Ingka : Ikea Industrie, Swedwood, Swedspan, Ikea Food Services pour les restaurants, Ikea Trading services…

Vous êtes déjà perdus ? Entre l’espace cuisine et le coin chambre, il reste encore à explorer la deuxième grande branche du fabricant de meubles : le groupe Inter Ikea. Il est légalement indépendant du groupe Ingka. Mais les deux opèrent sous la même marque : Ikea. Et sur le même modèle qu’Inkga, Inter Ikea est également détenu par une fondation, du nom d’Interogo. Celle ci-est basée au Liechtenstein, paradis fiscal au cœur de l’Europe. L’objectif principal de cette fondation n’est pas d’œuvrer pour l’intérêt général, mais, comme l’explique Ikea, « d’être propriétaire et de gouverner le groupe Inter Ikea, d’investir dans le groupe, et, par là, dans l’expansion du concept Ikea, dans le but de sécuriser l’indépendance et la longévité du groupe et du concept Ikea. » Manifestement, cette longévité passe par l’optimisation fiscale. Selon des recherches d’une télévision suédoise (STV) en 2011, la fondation Interego aurait permis au fondateur Ingvar Kamprad d’économiser en 20 ans entre 2,3 et 3,2 milliards d’euros d’impôts [2].

Une troisième société au Luxembourg, avec une filiale aux Antilles


Troisième branche de la pieuvre jaune et bleue : le groupe Ikano, fondé en 1988, est la propriété des trois fils d’Ingvar Kamprad. Cette société-ci, basée au Luxembourg, se compose d’un demi-douzaine de branches et de plus d’une dizaine de filiales dans le monde entier. Elle s’occupe de gestion financière, d’activités bancaires, d’assurance, de gestion immobilière… Parmi ses filiales, Ikano capital, une société de gestion du patrimoine basée en Suisse. Et une branche de la compagnie d’assurance Dutch Nordic Insurance, implantée dans le paradis fiscal de Curaçao, aux Antilles néerlandaises.

Combien d’impôt paient donc en fin de compte toutes ces branches du géant suédois du meuble ? Attac Allemagne a tenté le calcul. En 2012, le groupe Ingka, la société mère, a payé 695 millions d’euros d’impôts sur les bénéfices [3]. Ce qui correspond à un taux d’imposition de 17,8% [4]. Pour le groupe Inter Ikea, les impôts payés s’élevaient la même année à 58 millions d’euros. Ce qui correspond à un taux d’imposition de 11,6% au maximum. « Aucun chiffre n’est disponible sur les impôts payés par le groupe Ikano », précise Attac.

Selon le député socialiste Pierre-Alain Muet, rapporteur de la Mission d’information de l’Assemblée nationale sur l’optimisation fiscale des entreprises, Ikea a excusé cet été son refus d’être auditionné au prétexte « qu’elle ne disposait malheureusement pas de compétence dans ce domaine très technique. » Un argument « soit improbable soit inquiétant pour une entreprise de cette taille », réagit le député. À voir la complexité de l’organisation du groupe, le manque de visibilité semble faire partie intégrante de la stratégie d’Ikea. Au risque que les dirigeants eux-mêmes s’y perdent. Et surtout l’administration fiscale. « Pour nous, les enfants sont les personnes qui comptent le plus au monde », proclame la fondation Ikea. De là à s’acquitter pleinement de l’impôt pour financer l’éducation ou la santé publiques, il ne faut pas exagérer.

Rachel Knaebel

Photo : Le ferry de l’Ile de Wight, Red Osprey, aux couleurs d’Ikea. Source

 

Notes

[1Chiffres en 2013. Source.
[2Voir ici et ici.
[3Rapport annuel 2012, p 38.
[4En France, le taux d’impôt sur les sociétés est de 33 %.

12 mars 2014

En République démocratique du Congo, les médias blanchissent les États-Unis

Par FAIR
07/03/2014
Source : http://www.acrimed.org
English : In the democratic Republic of the Congo, the media whiten the United States


En République démocratique du Congo, nous dit FAIR dans cet article paru en janvier dans Extra !, son magazine mensuel, les médias américains n’ont pas manqué une occasion de saluer la contribution récente des Occidentaux à l’apaisement – temporaire – des tensions dans la région, oubliant de rappeler simultanément le rôle de ces derniers dans l’exacerbation des conflits au cours des deux décennies précédentes.

Cette vision partiale, puisque partielle, est révélatrice d’un certain opportunisme médiatique : elle permet aux journaux en question de se ranger à tous les coups du côté des vainqueurs et donc d’écrire l’histoire d’une façon pour le moins contestable. Car en matière de géopolitique, l’amnésie journalistique est sans doute plus fâcheuse encore qu’ailleurs : rendre compte du présent en occultant (sciemment ou non) le passé, c’est se condamner, ainsi que ses lecteurs, à une vision mutilée et manichéenne de la réalité historique, les journalistes se contentant de distribuer bons et mauvais points a posteriori, sans se soucier des cécités qui sont les leurs, et de leurs conséquences, y compris médiatiques. Nous vous proposons cette traduction en français de l’article original avec l’autorisation de son auteur, Steve Rendall. (Acrimed)

Les médias américains n’ont pas tari d’éloge sur les États-Unis et leurs alliés au sein de l’Otan pour avoir pesé de tout leur poids au cours de l’année écoulée afin de mettre un terme à une insurrection sanglante en République démocratique du Congo (RDC). Malheureusement, les journalistes ont généralement oublié de préciser que ces mêmes pays avaient attisé les conflits dans cette région depuis deux décennies en donnant carte blanche à leurs alliés dans cette zone.

Le 5 novembre 2013, la milice M23, soutenue par le Rwanda, a déposé les armes. Cette milice, parmi les plus redoutées en RDC, fut une des nombreuses organisations paramilitaires appuyées par les alliés des États-Unis que sont le Rwanda et l’Ouganda tout au long d’un conflit régional vieux de 17 ans (voir l’article du New York Times du 6/11/13).

Pendant 20 mois, la M23 a assassiné des civils, eu recours au viol, et a enrôlé de force des enfants au combat, ne rendant les armes qu’après l’interposition de la brigade d’intervention de l’ONU (composée presque exclusivement de soldats africains) à la suite d’une série de défaites militaires subies par l’armée régulière congolaise.

On a largement salué la pression occidentale sur le Rwanda visant à faire céder la M23 (voir notamment les articles parus dans le New York Times du 6/11/13 et le Christian Science Monitor du 7/11/13). En effet, à la suite d’un rapport de l’ONU rendu le 15/11/12 qui mettait en évidence le fait que la M23 avait été soutenue, entraînée et chapeautée par le Rwanda, les États-Unis ainsi que certains de leurs alliés occidentaux ont imposé des sanctions à ce pays, cessant de lui envoyer de l’aide, ce qui a privé la M23 d’un appui logistique considéré comme déterminant par beaucoup.



Ce que les grands médias ont négligé – l’un des multiples aspects qu’ils négligent systématiquement sur le conflit en RDC –, c’est le rôle durable joué par les États-Unis et leurs alliés occidentaux dans la protection et le financement des soutiens de la M23 et des organisations paramilitaires brutales qui les ont précédés dans la région.

Comme l’a expliqué le 12/12/13 dans un communiqué de presse l’association « Friends of the Congo », organisation militante basée à Washington, les efforts des États-Unis et de la Grande-Bretagne visant à obliger le Rwanda à couper les ponts avec la M23 ont été récompensés « après 17 ans pendant lesquels le régime rwandais est intervenu régulièrement en RDC en ayant pratiquement carte blanche. »

Les enjeux économiques et financiers liées aux ressources incroyablement riches du Congo sont tout aussi souvent négligés ; ces dernières aiguisent les appétits depuis que Joseph Conrad a écrit à propos du Congo à une époque plus ancienne et plus sanglante encore qu’il fut l’objet « du pillage le plus ignominieux ayant jamais défiguré la conscience humaine ». Au temps où Léopold, roi des Belges, sévissait au Congo, le caoutchouc et l’ivoire figuraient parmi les richesses les plus prisées du Congo ; aujourd’hui, le Rwanda – et d’autres – cherchent à faire main basse sur les ressources du Congo que sont l’or, les diamants, le tungstène, le coltan (minerai utilisé dans l’électronique) et le bois précieux.

Un rapport des experts onusiens datant de 2001 a condamné le Rwanda, l’Ouganda et le Zimbabwe pour le pillage des mines et autres ressources du Congo, vendues ensuite aux multinationales. Or ces mêmes ressources continuent de susciter conflits et interventions à l’est du Congo.

Le récit du New York Times (6/11/13) de la reddition de la M23 soulignait la pression occidentale ponctuelle mise sur le Rwanda, en oubliant le soutien régulier de ces mêmes Occidentaux au Rwanda et à l’Ouganda, principaux responsables des violences persistantes à l‘est du Congo. Cet oubli de la part du grand journal new-yorkais donnait le sentiment que les États-Unis et leurs alliés occidentaux étaient les héros dans cette histoire, qu’après avoir révélé les agissements de la M23 et le soutien du président rwandais Paul Kagame à celle-ci, le boulot avait été fait, et bien fait.

De la même façon, le Washington Post a omis de mentionner le soutien ancien des Occidentaux au Rwanda tout en présentant la reddition comme « l’heure de vérité » qui montrerait si « oui ou non le gouvernement et les rebelles seraient capables de trouver une issue politique » au conflit. Tout cela n’est sans doute pas faux ; mais comment les lecteurs pourraient-ils saisir la complexité d’un tel accord s’ils ignorent que ces diplomates missionnés par les gouvernements occidentaux soufflaient sur les braises au côté du Rwanda dans les mois qui ont précédé cet accord ?

En 2012, les États-Unis ont tenté d’empêcher la diffusion d’un rapport mettant au jour les liens entre le Rwanda et la M23 (voir le numéro du Guardian du 21/6/12). Ce fut un épisode parmi d’autres au cours duquel les États-Unis sont intervenus pour prendre la défense du Rwanda et de ses opérations illégales. Les États-Unis ont donné des millions de dollars sous forme d’aide militaire au Rwanda alors que l’on savait, preuves à l’appui grâce notamment au rapport des experts onusiens datant de 2001, que ce pays encourageait la violence et les pillages.

En passant d’un soutien prudent à l’égard du Rwanda à des pressions et des sanctions diverses, les États-Unis et leurs alliés ont sans doute fait ce qu’il fallait faire. Et ce changement de stratégie doit être souligné et salué.
Il est néanmoins compliqué de voir dans la transformation de l’attitude américaine un retournement majeur sans savoir ce qui a précédé, à l’époque où les États-Unis soutenaient sans réserve le Rwanda et les violences perpétrées.

Steve Rendall

Traduit par Thibault Roques

9 mars 2014

Grave crise entre les émirats du Golfe

Par Alain Gresh
07/03/2014
Source : http://blog.mondediplo.net
English : Serious crisis between the emirates of the Gulf

La version du texte en arabe ici.

La décision n’a pas vraiment surpris, car le feu couvait depuis longtemps sous la cendre. Le 5 mars, trois pays membres du Conseil de coopération du Golfe (CCG), l’Arabie saoudite, les Emirats arabes unis et le Bahreïn annonçaient, dans un communiqué commun, le rappel de leurs ambassadeurs au Qatar (« Saudi, Bahrain, UAE recall envoys to Qatar », Saudi Gazette, 5 mars).

Le communiqué précise que les trois pays « ont fourni des grands efforts pour négocier avec le Qatar à tous les niveaux et pour arriver à une politique commune (...) et garantir les principes de non ingérence dans les affaires intérieures des Etats-membres » (du CCG). « Ils ont aussi demandé au Qatar de ne soutenir aucun mouvement dont le but est de menacer la sécurité et la stabilité des Etat membres. »

Le communiqué fait également référence au sommet tripartite du 23 novembre 2013 entre l’émir du Koweït, celui du Qatar (le cheikh Tamilm qui venait de succéder à son père) et le roi d’Arabie saoudite, sommet au cours duquel un accord aurait été signé et que le Qatar n’aurait pas appliqué malgré plusieurs tentatives de médiation.

Cette mesure de retrait a entraîné une chute importante de la bourse de Doha, de 2 % pour l’index des 20 plus grandes sociétés, la plus forte baisse depuis 6 mois — mais les valeurs du marché sont en hausse de près de 10 % sur un an. Les valeurs les plus touchées ont été les télécommunications, les banques, le transport, l’immobilier (« Qatar shares drop 2%, largest single-day loss in 6 months », Gulf Times, 5 mars).

Le gouvernement de Doha a exprimé « ses regrets et sa surprise » après cette décision prise par « des pays frères ». Celle-ci est « contraire aux intérêts, à la sécurité et à la stabilité des peuples du CCG », mais est liée à des différences de points de vue sur des questions qui ne concernent pas le CCG (allusion sans doute à l’Egypte, lire « Qatar “regrets” envoys’ recall by three GCC states », Gulf Times, 6 mars). Toutefois, Doha a décidé de maintenir ses ambassadeurs dans les trois capitales.

Une source officielle à Doha, s’exprimant anonymement, a employé un langage moins diplomatique : « Le Qatar ne renoncera pas, quelles que soient les pressions, à sa politique étrangère. C’est une question de principes auxquels nous sommes attachés, quel que soit le prix à payer » (« Qatar “will not bow to pressure to alter foreign policy” », Reuters, 6 mars 2014).

Avant de revenir sur le fond des problèmes qui opposent le Qatar aux trois autres pays, une remarque s’impose : deux des six membres du CCG ne se sont pas joints à l’Arabie saoudite, ce qui est un revers pour le royaume. D’abord le Koweït, qui a tenté des médiations mais ne souhaite pas envenimer les choses ; de plus, comme le Qatar, le pays n’a pas signé l’accord de sécurité (le Parlement s’y oppose fortement). Ensuite Oman, qui s’est opposé à plusieurs reprises à ce qui est perçu comme une volonté hégémonique de Riyad et qui a refusé, lors du sommet du CCG en décembre, de cautionner le projet d’union des pays du Golfe, avec une dimension militaire (lire Marc Cher Leparrain, « Fronde d’Oman contre l’Arabie saoudite », OrientXXI, 22 janvier 2014.) Pour aggraver leur cas, les Omanais ont servi d’intermédiaires aux négociations secrètes entre l’Iran et les Etats-Unis.

Même le front des trois pays n’est pas aussi solide qu’on pourrait le penser, les Emirats arabes unis ayant, contrairement à l’Arabie saoudite, repris langue avec l’Iran : le ministre des affaires étrangères émirati s’est rendu à Téhéran le 28 novembre et son homologue iranien a été reçu à Abou Dhabi le 4 décembre.
Les relations entre le Qatar et l’Arabie saoudite sont tendues depuis des années, notamment à cause de la chaîne de télévision Al-Jazira, dont les critiques à l’égard du régime saoudien ont été constantes. L’Arabie avait retiré son ambassadeur à Doha en 2002, pour protester contre ses émissions. Il n’avait repris son poste qu’en 2008 à la suite d’une promesse de Doha d’atténuer le ton de sa chaîne satellitaire.

Mais cette crise semble beaucoup plus grave que les précédentes, car elle dépasse largement Al-Jazira, accusée par Riyad d’avoir repris ses critiques contre le royaume ces deux derniers mois. Riyad (et Abou Dhabi) reprochent au Qatar d’avoir aidé et financé les Frères musulmans en Arabie et dans les Emirats arabes unis (ce pays a arrêté des dizaines de membres de la confrérie, ou supposés tels). Or les Frères musulmans sont devenus l’ennemi principal des deux monarchies (lire mon article de novembre 2012, « Les Frères musulmans à l’épreuve du pouvoir », Le Monde diplomatique). Le 7 mars, à la suite de l’Egypte, l’Arabie saoudite a désigné les Frères comme « organisation terroriste ».

Au-delà de ce reproche, la pomme de discorde essentielle reste l’Egypte, Riyad et Abou Dhabi ayant salué le coup d’Etat de l’armée du 3 juillet 2013, le Qatar l’ayant condamné. Les relations entre Doha et Le Caire restent mauvaises et l’Egypte, dont l’ambassadeur au Qatar a quitté son poste en février, reproche à l’émirat de s’ingérer dans ses affaires intérieures et de refuser d’extrader des « criminels » qui s’y sont réfugiés.

Enfin, les critiques du cheikh Youssef Al-Qaradhawi contre la famille régnante aux Emirats début février avait provoqué une convocation de l’ambassadeur du Qatar à Abou Dhabi. Il faut noter toutefois que le cheikh, qui présentait une des émissions phare d’Al-Jazira, « La charia et la vie », en a été privé depuis plusde six mois sans qu’aucune explication n’ait été avancée ; en revanche, il prononce la khotba du vendredi dans l’une des grandes mosquées de Doha.

La presse saoudienne a ajouté deux griefs à ces accusations (« Saudi Arabia and other Gulf States lose patience with Qatar », BBC Monitoring research, 5 mars 2014) :

- celui d’aider les groupes les plus extrémistes en Syrie, notamment le Front Al-Nosra (reproche fait aussi à la Turquie) ; il est à noter pourtant que le Qatar, les Emirats arabes unis et l’Arabie saoudite soutiennent tous la rébellion en Syrie ;

- celui d’aider les rebelles « houtistes » au Yémen (c’est la première fois que je lis une telle accusation ; lire Pierre Bernin, « Les guerres cachées du Yémen », Le Monde diplomatique, octobre 2009).

Cette crise est la plus sérieuse qu’ait connue le CCG depuis sa fondation. Elle est d’autant plus significative que l’on assiste à une réorganisation de la région avec la détente (relative) entre l’Iran et les Etats-Unis. Le sommet arabe qui doit se tenir à la fin du mois au Koweït risque d’être agité. La réaction française est restée discrète, c’est le moins qu’on puisse dire. Seule la sénatrice Nathalie Goulet a publié un communiqué attirant l’attention sur le caractère dangereux de l’escalade.

Les Etats-Unis face à l’islam politique

Université populaire, samedi 8 mars 2014
- Séance 1 (10h30-12h30)
Dialogue introductif, avec Jean-Paul Chagnollaud, professeur des Universités, directeur de l’iReMMO et de la revue Confluence Méditerranée, et Alain Gresh, journaliste au Monde diplomatique et animateur du blog Nouvelles d’Orient.
- Séance 2 (14h-16h)
Le tournant de la guerre en Afghanistan, avec Gilles Donrrosoro, professeur en science politique à l’Université Paris I.
- Séance 3 (16h-18h)
Positionnement politique des Etats-Unis face aux gouvernements post révoltes arabes, avec Karim Emile Bitar, directeur de recherche à l’IRIS.
Contact et inscription : universite-populaire@iremmo.org
Participation : 20 euros pour la journée (12 euros pour les étudiants et les demandeurs d’emploi) ; carte Intégrale 145/90€
Lieu : iReMMO 5, rue Basse des Carmes, 75005 Paris (M° Maubert Mutualité)

8 mars 2014

Chine : cyberstratégie, l’art de la guerre revisité

Par Frédérick DOUZET
12/09/2013
Source : http://www.diploweb.com
English : China : cyberstrategy, the art of war revisited



La Chine est devenue un acteur majeur et incontournable du cyberespace, avec une volonté claire d’exister, de développer ses outils stratégiques et de ne pas dépendre technologiquement d’autres nations pour maîtriser au mieux l’information stratégique. Bien que le régime ait développé d’importantes cybercapacités, elles semblent moins centralisées, coordonnées et maîtrisées que ce que les discours sur la menace chinoise laissent à croire. Dans le brouillard juridico-stratégique du cyberespace, la Chine pousse cependant son avantage en menant des offensives de basse intensité et une politique de renseignement et d’influence qui témoigne de sa volonté de fomenter les outils de sa puissance et de se positionner comme un acteur avec lequel il faudra compter.

Le Diploweb.com est heureux de vous présenter cet article inédit dans le cadre de son partenariat avec le 24ème Festival International de Géographie : "La Chine, une puissance mondiale", 3 au 6 octobre 2013, Saint-Dié-des-Vosges.

A L’HEURE où les grandes puissances occidentales multiplient les initiatives et les investissements pour développer une stratégie cohérente face aux cybermenaces, la Chine fait paradoxalement figure de leader. Sa capacité à intégrer la dimension cyber dans tous les domaines stratégiques de sa montée en puissance - aussi bien militaire, que politique ou économique - impressionne, inquiète et suscite en réaction de vifs débats qui révèlent les contradictions et les fragmentations de la réflexion stratégique occidentale, dans un contexte de tensions géopolitiques qui rappelle le temps de la guerre froide.

Partie tardivement dans la course au développement de l’Internet, la Chine a en effet compensé son handicap technologique par le développement rapide d’une stratégie compréhensive qui s’appuie sur les principes de l’art ancestral de la guerre, notamment la volonté de développer une supériorité informationnelle aussi bien offensive que défensive.

L’élaboration de la cyberstratégie de la Chine


Sur le plan intérieur, le régime s’est montré particulièrement créatif en matière de censure et de propagande, usant d’un savant alliage de technologie de pointe, de pratiques éprouvées d’oppression politique (intimidation, collaboration forcée, délation, surveillance, répression), d’un arsenal juridique et d’offensives de communication pour museler l’opposition collective et contrôler le contenu.

L’impératif de survie du régime autoritaire a stimulé la réflexion stratégique des dirigeants en la matière. D’entrée, le gouvernement a pris le contrôle de la distribution de la connectivité et par la force d’attractivité de sa croissance économique, a contraint les entreprises américaines à développer la technologie de filtrage permettant de contrôler l’information en circulation, construisant ainsi une véritable muraille du Net autour du pays. La Chine s’est dotée d’une patrouille de l’Internet, a contraint les fournisseurs d’accès à fournir les coordonnées des utilisateurs, a fermé des cybercafés dans l’irrégularité par centaines et s’est donné les moyens de couper ou ralentir le trafic vers les serveurs politiquement incorrects, dont le célèbre Google.

Aussi sophistiquée soient-elles, les méthodes n’ont pas résisté à la croissance exponentielle du nombre d’utilisateurs, passé de 137 à 538 millions en 6 ans. Mais là encore le régime n’a cessé de s’adapter. Une étude récente [1] montre que désormais, la stratégie de censure ne vise plus à empêcher l’opposition de critiquer le parti et ses dirigeants, y compris de façon virulente, mais à l’empêcher de s’organiser collectivement. Le régime est ainsi capable de trouver, analyser et tout simplement supprimer de l’Internet les propos qui représentent, renforcent ou encouragent la mobilisation sociale. Sa cohésion interne est aussi un enjeu pour son existence sur la scène internationale. Elle a également su soumettre les acteurs internationaux (notamment américains) à ses velléités de contrôle. On se souvient du bras de fer avec Google en 2010 suite à des intrusions répétées sur des messageries Gmail de dissidents chinois.

Face à la supériorité militaire des Etats-Unis, le régime a choisi l’approche asymétrique, menant une offensive tous azimuts visant à exploiter toutes les ressources du cyberespace, dans une optique de modernisation de son armée. Elle vise à recueillir, par des voies légales ou illégales, de l’information de haut niveau scientifique, technologique, économique mais aussi politique et stratégique (veille, intelligence, intrusions, espionnage).

Le maître mot est « informationisation », une conception stratégique de l’information qui se trouve désormais au cœur de tous les supports de l’expression de la puissance chinoise. La maîtrise de l’information est devenue prioritaire et indissociable de tous les autres domaines, aussi bien militaires que politiques ou économiques. Avoir la capacité de recueillir par de multiples sources, recouper, vérifier l’information pour s’assurer de sa fiabilité, mais aussi de la manipuler, la déformer, la transformer pour tromper ou faire douter l’adversaire, autant de techniques ancestrales qui avec l’interconnexion croissante des réseaux et la rapidité de circulation de l’information des prennent des proportions inédites. Les opérations sur les réseaux d’information et de communication sont désormais indissociables de tout conflit et de toute opération militaire. Cette stratégie explicitée dans l’ouvrage Unrestricted Warfare (la guerre sans limite) de deux anciens colonels de l’Armée de Libération Populaire, Qiao Liang and Wang Xiangsui, publié en anglais en 1999, a renforcé les inquiétudes sur les cybercapacités de la Chine.

La montée en puissance internationale


La Chine s’affirme aussi au niveau international par son lobbying sur la gouvernance de l’Internet, sa tentative d’autonomisation du réseau, le renforcement de sa zone d’influence et ses démonstrations de force. Comme en Russie, le gouvernement considère son réseau comme un domaine de souveraineté qui doit relever de son contrôle, une position totalement à l’opposée des Etats-Unis qui défendent un Internet libre et ouvert, gouverné par un organe indépendant mais néanmoins sous tutelle du secrétariat du commerce américain.

En 2010, la Chine est accusée d’avoir détourné 15% du trafic internet mondial (« hijacking ») pendant 18 minutes, une façon de laisser entrevoir ses capacités sans pour autant que le gouvernement reconnaisse la moindre implication. En matière de cyber, la question de l’attribution (qui est réellement derrière une attaque et pourquoi) reste entière et la Chine proteste vivement contre les accusations d’espionnage visant le gouvernement ou l’armée, estimant que les Etats-Unis sont largement supérieurs d’un point de vue technologique et que la Chine est la première victime des attaques.

Elle développe enfin une politique industrielle qui la place au cœur du système, avec la fabrication à des coûts défiant toute concurrence d’équipements, notamment de routeurs, matériels très utiles pour qui veut observer le trafic Internet. La Chine a lancé des satellites de navigation auquel ironiquement la NSA a continué à avoir recours, en pleine escalade des tensions sur le cyberespionnage, alors que le Congrès dans une résolution budgétaire interdisait l’utilisation de matériel informatique chinois par le gouvernement et la défense.

A l’égard des grandes puissances mais aussi des puissances régionales de l’ASEAN, la Chine est accusée de multiplier les attaques de faible impact (intrusions sans dommages dans les réseaux), dont l’intensité n’est pas suffisante pour déclencher un conflit ouvert mais qui sont autant de messages sur les cybercapacités du pays et d’outils stratégiques. Les intrusions dans les systèmes permettent non seulement de recueillir des informations cruciales mais aussi de cartographier les vulnérabilités des réseaux ou de constituer des armées de zombies (ordinateurs infectés par un virus mobilisables pour une attaque) qui pourront être exploitées dans d’autres circonstances, en cas de crise.

Du point de vue américain et européen, la cyberstratégie chinoise est souvent présentée comme coordonnée et centralisée au plus haut niveau de gouvernement et commandement militaire, et dotée d’une efficacité redoutable. Pour autant, si le gouvernement a su faire preuve d’ingéniosité et d’adaptabilité, force est de constater que nombre d’initiatives échappent à son contrôle. De jeunes hackers chinois rivalisent d’audace pour assurer leur carrière ou affirmer la puissance de leur employeur (entreprise, agence d’Etat ou civils indépendants…), bien souvent hors de la supervision de stratèges séniors, dépassés par la technique. Les attaques se multiplient au sein même de la Chine, avec des conséquences préoccupantes pour l’économie. Les discussions diplomatiques montrent l’émergence de réelles préoccupations et la recherche d’une stratégie plus centralisée, d’une possible coopération internationale sur l’établissement de règles communes et contre la prolifération des cyberarmes, ce que les Russes dénoncent comme la militarisation du cyberespace.

 La cybermenace chinoise : une invention américaine ?


Alors, la cybermenace chinoise serait-elle exagérée ? Depuis le début de l’année 2013, on assiste à une véritable montée en puissance du discours sur la menace chinoise et une escalade des tensions entre les Etats-Unis et la Chine. Révélations dans la presse sur les cyberattaques chinoises, sortie du rapport Mandiant à la veille de la plus importante conférence sur la sécurité informatique aux Etats-Unis, accusations de plus en plus directe de l’administration Obama contre le gouvernement chinois, fuite dans la presse d’un rapport juridique secret autorisant le président américain à des frappes pré-emptive pour contrer les cyberattaques… Après avoir sommé les fabricants chinois Huawei et ZTE de s’expliquer devant le Sénat sur la possible implantation de backdoors (portes dérobées) dans leurs équipements, permettant d’espionner les utilisateurs, les dirigeants américains ont expliqué au Congrès que le risque cyber surpassait désormais le risque terroriste.

L’affaire PRISM a révélé ce que nombre d’experts savaient déjà : la Chine n’est pas le seul enfant terrible du cyberespace, loin de là. Et toute la propagande chinoise est désormais axée sur l’affaire Snowden qui a révélé en juin 2013 l’ampleur de la surveillance menée par la NSA aux Etats-Unis et dans le monde. La France, la Russie, Israël sont également réputés pour leur utilisation offensive des cybercapacités. Toutes les attaques dont la trace remonte en Chine ne proviennent pas nécessairement de Chine tant les serveurs sont relativement simples à pénétrer et peuvent faire écran aux desseins d’autres acteurs. Il n’est nullement question de nier l’ampleur des intrusions et de l’espionnage mené par la Chine mais de relativiser le discours que d’autres nations peuvent tenir à son encontre.

Les Chinois pointent à juste titre la très grande centralisation de la politique de cyberdéfense américaine (US CYBERCOMMAND), plutôt surprenante venant d’un Etat fédéral aussi décentralisé, et l’avalanche de moyens qui lui sont consacrés aux Etats-Unis. Le Général Keith Alexander, directeur du cybercom mais également de la NSA, affirme désormais clairement le développement de capacités offensives ainsi que l’augmentation considérable de ses effectifs et de son budget (+ $800 millions), en pleine période de restrictions budgétaires.

Les représentations de la menace chinoise ne sont pas nouvelles et montent en puissance depuis plusieurs années dans le discours stratégique américain, pour des raisons géopolitiques liées au contexte de rivalités internationales et domestiques. La perception de la menace repose sur le prémice d’une volonté hégémonique de la Chine, dont l’ascension économique, militaire et politique serait dangereuse en raison de sa volonté de puissance et d’expansion. C’est une vision partagée par les stratèges réalistes et pessimistes qui perçoivent les relations internationales comme un jeu à somme nulle, où l’ascension des uns conduirait nécessairement à la perte de puissance des autres. En l’occurrence, la Chine pourrait remettre en question la puissance d’une Amérique sur le déclin. Cette représentation repose aussi sur le présupposé que la Chine possède les moyens de ses ambitions, ce qui en matière cyber reste à démontrer. Les révélations sur les programmes de la NSA laissent à penser que les Etats-Unis conservent une longueur d’avance.

L’exacerbation de la cybermenace chinoise s’inscrit aussi dans un contexte politique interne aux Etats-Unis de véritable bras de fer entre l’administration Obama et le Congrès. Alors que leurs relations sont tombées dans l’impasse du budget sequester, elle permet de rappeler que les budgets fédéraux servent aussi au maintien de la sécurité nationale. Dans l’impossibilité de légiférer en raison d’une polarisation politique trop importante, l’administration Obama a joué le passage en force par décret présidentiel sur la cyberesécurité, en multipliant les alertes sur l’importance des enjeux.

Le discours de la menace est aussi porté par une multiplicité d’acteurs qui sont susceptibles d’y trouver leur intérêt, notamment financiers, alors que la cybersécurité fait partie des très rares budgets fédéraux en augmentation. Et le marché florissant de la cybersécurité se porte d’autant mieux que la prise de conscience des risques est importante.

Enfin, du point de vue de l’administration Obama, l’agitation de la menace chinoise pouvait aussi permettre de détourner l’attention d’initiatives américaines qui pourraient être considérées comme « hors limites ». Car à ce jour, la première attaque sérieuse qui pourrait être considérée comme un acte de « cyberguerre » reste le virus Stuxnet, élaboré par l’administration américaine en collaboration avec le gouvernement israélien pour perturber les programmes nucléaires iraniens, une sorte de troisième voie expérimentale entre la diplomatie coercitive et le conflit ouvert et dont les conséquences à venir restent à explorer.

Cette représentation de la menace chinoise, si on peut la relativiser, n’est pas pour autant anodine. Elle joue un rôle dans les rivalités de pouvoir géopolitique et pourrait conduire à une escalade des tensions entre les Etats-Unis et la Chine, en dépit de l’interdépendance économique qui lie les deux puissances. Les révélations d’Edward Snowden ont fortement affaibli la position des Etats-Unis, aussi bien à l’égard de la Chine et de la communauté internationale qu’en interne. Il semble désormais impossible, dans le contexte de défiance publique actuelle, de pouvoir mettre en œuvre le plan de cyberdéfense qui jusqu’à récemment n’aurait suscité l’intérêt que d’une petite minorité d’initiés. Pour autant, la Chine semble chercher à sortir de la logique d’escalade pour discuter des règles de conduite dans le cyberespace en se posant comme une alternative à la position américaine. Une tentative dont il est bien trop tôt pour savoir ce qu’il en adviendra.

Conclusion


Une chose est claire, la Chine est devenue un acteur majeur et incontournable du cyberespace, avec une volonté claire d’exister, de développer ses outils stratégiques et de ne pas dépendre technologiquement d’autres nations pour maîtriser au mieux l’information stratégique. Bien que le régime ait développé d’importantes cybercapacités, elles semblent moins centralisées, coordonnées et maîtrisées que ce que les discours sur la menace chinoise laissent à croire. Dans le brouillard juridico-stratégique du cyberespace, la Chine pousse cependant son avantage en menant des offensives de basse intensité et une politique de renseignement et d’influence qui témoigne de sa volonté de fomenter les outils de sa puissance et de se positionner comme un acteur avec lequel il faudra compter.

Copyright Septembre 2013-Douzet/Diploweb.com 



Plus
. Le site du Festival International de Géographie : "La Chine, une puissance mondiale", 3 au 6 octobre 2013 à Saint-Dié-des-Vosges.
. Voir sur le Diploweb.com tous les articles et toutes les cartes sur la Chine.

Bibliographie
Séverine Arsène, 2011, Internet et politique en Chine, Karthala, Paris, 420 p.
Frédérick Douzet, « Les frontières chinoises de l’Internet », Hérodote, n°125, 2007.
Miguel Alberto N. Gomez, « Awaken the Cyber Dragon : China’s Cyberstrategy and the Impact on ASEAN », International Conference on Cybersecurity, Cyber Peacefare and Digital Forensic (CyberSec2013).
Qiao Liang, Wang Xiangsui, Unrestricted Warfare : China’s Master Plan to Destroy America, Pan American Publishing Company, 2002 (original edition : Beijing : PLA Literature and Arts Publishing House, February 1999).
Gary Ping, Jennifer Pan, Margaret E. Roberts, « How Censorship in China Allows Government Criticism but Silences Collective Expression », APSA 2012 Annual Meeting Paper.
Jean-Loup Samaan, La menace chinoise. Une invention du Pentagone ?, Vendémiaire, 2012.
David Sanger, Confront and Conceal : Obama’s Secret War and Surprising Use of American Power, Broadway Books, 2012.
Justin Vaïsse, Barack Obama et sa politique étrangère (2004-2008), Odile Jacob, 2012.
Séverine Arsène, 2011, Internet et politique en Chine, Karthala, Paris, 420p.

4 mars 2014

Ukraine , un pays-clé écartelé entre Est et Ouest

Par Sébastien Gobert
12/2013
Source : http://www.monde-diplomatique.fr
English : Ukraine, a country torn between East and West Key

L’Ukraine se dérobe à l’orbite européenne


Fin novembre, à quelques jours de la signature d’un accord d’association avec l’Union européenne, Kiev a soudainement rompu les négociations, accédant ainsi à la demande pressante de Moscou. Coincée entre deux puissances qui voient en elle tantôt un grand marché, tantôt un pion géopolitique, l’Ukraine, sous la
conduite de son gouvernement autoritaire, zigzague sur une voie étroite.

« Nous voulons notre intégration européenne ! L’Ukraine, c’est l’Europe ! » : au soir du 21 novembre, les esprits s’échauffent sur Maidan Nezalezhnosti, la place de l’Indépendance de la capitale ukrainienne, Kiev. Plus d’un millier de manifestants ont résolu d’y passer la nuit, dans un élan apparemment spontané que certains s’empressent de qualifier de « second Maidan ». Il y a neuf ans, le 22 novembre 2004, c’est ici que s’étaient montées les premières tentes du mouvement de protestation civique qui allait devenir la « révolution orange ».

Comme alors, le président Viktor Ianoukovitch est la bête noire des manifestants. Mais cette fois-ci, il ne s’agit pas d’élections truquées. « Le gouvernement a décidé d’abandonner tous les préparatifs en vue de la signature de l’accord d’association avec l’Union européenne, qui devait avoir lieu à Vilnius dans quelques jours », explique Andriy, 21 ans, étudiant à l’université Taras-Chevtchenko de Kiev. « Et à la place, il a demandé à ses ministres d’intensifier la collaboration avec les pays de la Communauté des Etats indépendants, héritiers de l’URSS ! », s’emporte-t-il.

 Results of the re-run second round of the Ukrainian presidential election, 2004 

C’est dans le cadre du partenariat oriental que l’Ukraine avait négocié avec l’Union européenne cet accord d’association. Lancée en 2009, l’initiative vise à encourager le rapprochement de six républiques postsoviétiques avec l’Union européenne, notamment à travers la conclusion d’accords d’association ambitieux, aux répercussions tant politiques qu’institutionnelles et économiques. Parmi ces six pays, l’Azerbaïdjan, l’Arménie et la Biélorussie ne sont guère avancés dans les négociations. En revanche, la Géorgie et la Moldavie, après avoir fait de l’intégration européenne une priorité de longue date, sont en position de parapher leurs accords respectifs.

 

Menaces du Kremlin


Après avoir franchi cette première étape en mars 2012, l’Ukraine s’apprêtait à signer un document définitif lors du sommet de Vilnius des 28 et 29 novembre. Elle était même le poids lourd du partenariat. Avec près de quarante-six millions d’habitants, l’ancienne république soviétique représente aux yeux des investisseurs et des analystes de Bruxelles un eldorado économique, agricole et énergétique aux portes de l’Union européenne. De nombreuses études prophétisaient que l’établissement d’une zone de libre-échange ouvrirait des perspectives de croissance inédites, à travers une modernisation des structures de production et un assainissement des milieux d’affaires. Pour Mme Catherine Ashton, haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères, « l’Ukraine a beaucoup perdu » en renonçant à signer l’accord.

Les restructurations exigées dans l’industrie comme dans les services et la concurrence accrue des produits européens auraient néanmoins exigé d’importants efforts d’adaptation — comprendre : des sacrifices — de la part des Ukrainiens, sans que l’Union offre de contrepartie financière significative. La justification officielle de l’abandon des négociations tient d’ailleurs à la « sécurisation » de l’économie du pays.


« Ces accords d’association reflètent en quelque sorte un esprit colonial, dans le sens où on traite ces pays, très différents les uns des autres, avec la même approche », admet, sous couvert d’anonymat, un diplomate occidental en poste à Kiev. « L’incorporation de l’acquis communautaire et l’ouverture des marchés qu’on leur demande seraient bien plus avantageuses pour les investisseurs européens que pour les entrepreneurs ukrainiens. » L’Union a donc, elle aussi, beaucoup perdu…

Sur le plan diplomatique, Bruxelles subit une débâcle. Sans l’Ukraine, pièce maîtresse de la géopolitique régionale, le partenariat oriental et les perspectives d’européanisation et de stabilisation du voisinage est-européen de l’Union semblent bien mal en point. « L’oscar politique doit revenir à M. Vladimir Poutine », nous glisse l’ancien président Viktor Iouchtchenko. Considérant Kiev comme le berceau historique et spirituel de la Russie, le président russe a en effet publiquement désapprouvé tout rapprochement avec Bruxelles.

Et fortement incité M. Ianoukovitch à rejoindre l’union douanière que la Fédération de Russie forme avec la Biélorussie et le Kazakhstan, embryon d’une vaste union eurasienne à naître d’ici 2015. Des projets incompatibles avec l’établissement d’une zone de libre-échange entre l’Ukraine et l’Union européenne, qui aurait accompagné la mise en œuvre de l’accord d’association.
Le Kremlin a promis à son voisin des avantages substantiels en cas d’alignement sur Moscou. Il a aussi multiplié les avertissements sur de possibles tensions gazières, financières ou ethnoculturelles. Fin juillet, les autorités russes ont interdit la vente sur leur territoire de chocolat ukrainien, avant de décréter, mi-août, un boycott commercial généralisé. A cette occasion, un conseiller du président Poutine, M. Sergueï Glaziev, a annoncé que des contrôles stricts seraient imposés de manière permanente si l’Ukraine prenait la « décision suicidaire » de signer l’accord d’association. « Tout le monde sait que le Kremlin considère l’Ukraine comme la clé de son projet d’intégration eurasienne », lâche M. Volodymyr Oliynyk, député du Parti des régions, majoritaire à la Verkhovna Rada, le Parlement national. « Mais agir ainsi, ce n’est pas une attitude civilisée à l’égard d’un partenaire. »

 

Eviter toute ingérence


Cependant, s’il compromet durablement les perspectives européennes de son pays, M. Ianoukovitch ne s’est pas pour autant engagé à rejoindre l’union douanière chère à Moscou. « Le président et les oligarques de son “clan de Donetsk” [ville de l’est du pays] sont nationalistes sur le plan économique. Ils ne veulent céder leur souveraineté ni à l’Union européenne ni à la Russie », explique Taras Kuzio, chercheur à la School of Advanced International Studies de Washington. « Ils souhaitent vivre dans un pays “prémondialisé” » — libre des ingérences de Moscou ou de Bruxelles. « La famille » — les proches du très autoritaire M. Ianoukovitch — affermit depuis quelques mois sa mainmise sur l’Ukraine.

Source

Que ce soit en termes économiques, politiques ou judiciaires, elle tâche d’éviter qu’une puissance se trouve en mesure de mettre en cause ses acquis. Les atermoiements autour de Mme Ioulia Timochenko, ancienne première ministre emprisonnée depuis 2011 pour abus de pouvoir et dont l’Union européenne réclame en vain la libération, illustrent une forme de « double pensée » orwellienne, selon Kuzio : un pas de deux permanent qui permet à l’exécutif ukrainien de louvoyer entre Bruxelles et Moscou, mais aussi de ne pas s’attaquer aux problèmes de fond qui gangrènent la société. A Kiev, la frontière se brouille entre autonomie nationale et isolationnisme.

Sébastien Gobert Journaliste, Kiev.

3 mars 2014

Fukushima : vers une contamination planétaire ?

Source : http://www.france3.fr


Trois ans après la catastrophe nucléaire de la centrale de Fukushima Daiichi, une autre catastrophe se profile. Sanitaire celle là. Les premiers cas de cancer sont apparus. 26 déjà, tous chez des enfants de 0 à 18 ans. Plus d’une trentaine de cas sont suspects, et des dizaines de milliers d’enfants n’ont pas encore été testés. Le gouvernement tente de minimiser l’ampleur du drame. Mais les familles s’angoissent, et des mères sont en colère. La contamination s’étend, au-delà du Japon.

Tous les jours, des centaines de tonnes d’eau hautement contaminée sont déversées dans le Pacifique. Sur les plages de Californie les chercheurs, témoins de l’arrivée quotidienne de déchets du tsunami sur leurs plages, tentent par tous les moyens d’alerter les autorités. Les scientifiques du monde entier redoutent les effets incalculables sur la santé des populations si les poissons du pacifique continuent à être consommés sans aucun contrôle : un laboratoire d’analyses suisse vient de découvrir du césium 131 et 134 dans des barquettes de poisson dans un supermarché, ou dans du thé vert venant du Japon !!

Quelle est l’ampleur réelle de la contamination, humaine et environnementale ? Les contrôles sont-ils efficaces ? Sommes-nous au bord d’une catastrophe sanitaire à l’échelle mondiale ?

Enquête sur le premier scandale nucléaire de l’ère de la mondialisation.

Un documentaire de 52'
de Lionel de Coninck
Une production Code 5
avec la participation de France 3


2 mars 2014

Le Mexique privatise son pétrole

Par John Mill Ackerman
03/2014
Source : http://www.monde-diplomatique.fr
English : Mexico privatized its oil

 Le 20 décembre 2013, le Mexique a fait un bond de soixante-seize ans dans le temps quand le président Enrique Peña Nieto a annoncé une réforme constitutionnelle remettant le contrôle de l’industrie pétrolière aux mains des mêmes multinationales qui en avaient été écartées par le père de l’Etat moderne mexicain, le président Lázaro Cárdenas, en 1938. Cela faisait trois décennies que la clique de politiciens néolibéraux qui gouverne le pays échouait dans sa tentative de démanteler le monopole d’Etat de Petróleos Mexicanos (Pemex) et de privatiser la rente pétrolière. Mais en décembre dernier, presque sans aucun débat et comme un coup de tonnerre, il leur a fallu moins de deux semaines pour rassembler les votes nécessaires et accomplir cette transformation historique de la constitution mexicaine (lire « Echec et mat pour la gauche mexicaine »).

Avant la réforme, l’industrie pétrolière mexicaine était l’une des plus « nationales » du monde. Elle contenait une stricte interdiction constitutionnelle contre toute forme de contrat ou de concession accordée au secteur privé lui attribuant un contrôle direct ou des droits de propriété sur l’une des étapes de l’extraction, du raffinage ou de la commercialisation du pétrole. Avec les réformes des articles 25, 27 et 28 de la constitution mexicaine de 1917, Pemex se voit reconvertie en simple sous-traitant du ministère de l’énergie. Le président pourra décider, après appel d’offres mais sans aucune intervention du pouvoir législatif, de la répartition des différents gisements pétrolifères entre les entreprises intéressées. La réforme ouvre également la porte à l’expansion massive de la fracturation hydraulique, ou fracking, sur l’ensemble du territoire mexicain pour l’extraction du pétrole et du gaz naturel.

Le Washington Post a immédiatement salué ces réformes avec émotion :« Alors que l’économie du Venezuela implose et que la croissance du Brésil stagne, le Mexique est en train de devenir le producteur de pétrole latino-américain à surveiller — et un modèle de la façon dont la démocratie peut aider un pays en développement » (éditorial du 16 décembre 2013). Le Financial Times a également applaudi « le vote historique du Mexique en faveur de l’ouverture de son secteur pétrolier et gazier aux investissements privés, après soixante-quinze ans de soumission au joug de l’Etat, (...) un joli coup politique de la part d’Enrique Peña Nieto » (15 décembre 2013). La revue Forbes, quant à elle, promettait : M. Peña Nieto « restera dans les livres d’histoire » (18 novembre 2013).

Ceux qui défendent les modifications de la constitution postulent que Pemex est devenue une entreprise inefficace et corrompue, incapable de tirer avantage des énormes réserves de pétrole et de gaz naturel du pays : approximativement 30 milliards de barils de pétrole et 46 450 milliards de mètres cube de gaz naturel (seul l’Arctique détiendrait de plus grandes réserves de pétrole brut inexplorées). Alors que la production du pétrole au Mexique a fondu ces dernières années d’un pic de 3,3 millions de barils par jour en 2004 à seulement 2,5 millions actuellement, les auteurs de la réforme promettent qu’elle permettra de la porter à 4 millions de barils par jour à l’horizon 2025.

Il n’existe toutefois aucune garantie que l’entrée en scène des multinationales dope la production. La priorité de ces entreprises n’est pas l’exploitation directe du pétrole, mais le contrôle des nouvelles réserves afin de soutenir leur cote en bourse. Est-ce vraiment un hasard si l’un des articles de la réforme énergétique précise que bien que le pétrole mexicain restera « propriété de la nation », les entreprises privées qui bénéficieront de nouvelles licences « pourront reporter dans leur comptabilité et leur bilan l’allocation ou le contrat ainsi que les bénéfices attendus » ?

Ces « bénéfices » pourraient bien ne jamais se matérialiser. Le cas de Repsol en Argentine est un excellent exemple de contraction de la production, dans un contexte de privatisation (1). En avril 2012 le gouvernement de Cristina Fernández de Kirchner a même décidé de nationaliser l’entreprise en réponse à ce qu’elle considérait comme une politique délibérée « de saccage » et « d’improductivité » (2). Les menaces des sociétés pétrolières de ralentir leur production motivèrent également l’expropriation décidée par Cárdenas au Mexique, en 1938.

L’enthousiasme de la presse contraste avec le scepticisme des Mexicains, nourri par une longue expérience des privatisations au cours des deux dernières décennies. Le principal résultat de cet épisode ? L’enrichissement d’une poignée de familles qui forment aujourd’hui une oligarchie prédatrice et corrompue, contrôlant tous les aspects de la vie politique et économique du pays (3). Sans surprise, toutes les études d’opinion suggèrent qu’une grande majorité de la population rejette la privatisation de l’industrie pétrolière (4).

Pourquoi imaginer que le nouveau spasme privatisateur se distingue du précédent ? Après tout, M. Peña Nieto doit sa carrière politique à son mentor, l’ex-président Carlos Salinas de Gortari (1988-1994), responsable de la plus grande partie des privatisations antérieures. Les deux hommes sont membres du très ancien Parti Révolutionnaire institutionnel (PRI), qui a gouverné le pays pendant soixante et onze ans et qui demeure le plus corrompu du pays.
Mais la privatisation présente également un autre danger : celui d’une importante crise budgétaire. A l’heure actuelle, Pemex fournit un tiers de son budget à l’Etat fédéral. Le gouvernement compensera-t-il le manque à gagner par une hausse de la fiscalité sur des entreprises aussi puissantes qu’Exxon-Mobil, Shell ou Chevron ? Les doutes s’avèrent fondés : quelques jours après que la réforme pétrolière a été annoncée, M. Peña Nieto s’est plié aux pressions des grandes entreprises en signant un décret les exemptant d’une série de nouveaux impôts approuvés à peine deux mois auparavant.

Et si le gouvernement mexicain ne peut pas, ou ne veut pas récolter les impôts nécessaires, il sera bien moins en mesure d’éviter les graves atteintes à l’environnement qui accompagnent inévitablement l’expansion de l’extraction pétrolière — un danger particulièrement important lorsqu’on utilise la technique du fracking. En France, le Conseil constitutionnel a récemment avalisé la loi du 13 juillet 2011 qui interdit précisément l’utilisation de cette technique en raisons des dangers environnementaux qu’elle présente. Au Mexique, le Congrès et la Cour suprême de justice auraient difficilement assez de poids pour résister aux pressions des entreprises pétrolières et prendre une telle mesure. L’impunité dont jouissent les entreprises minières canadiennes sur le sol mexicain n’est qu’une illustration supplémentaire de la vague de destruction environnementale que pourraient entraîner les nouvelles réformes pétrolières.

Face au rejet de la réforme par la population, le gouvernement se réfugie derrière la « grande coalition » politique dont le président s’est armé pendant la première année de son mandat : le « Pacte pour le Mexique », qui a réuni à la table de négociation les dirigeants des trois principaux partis politiques en vue d’un accord sur un agenda législatif commun.

Succès indéniable dans la mesure où il a atténué les conflits entre les membres de la vieille classe politique qui gouverne le pays depuis trois décennies, le Pacte a simultanément approfondi le fossé entre le monde politique et la société. L’enquête annuelle Latinobarómetro révélait en 2013 que seuls 21 % des Mexicains s’estimaient « satisfaits » de leur démocratie : le pire résultat de la région latino-américaine. L’hebdomadaire The Economist anticipe même un soulèvement social au cours des prochaines années. Il a inclus le Mexique dans sa liste des soixante cinq pays du monde présentant les plus hautes probabilités de « rébellion » au cours de l’année 2014 (5).

Paradoxalement, ce mécontentement généralisé pourrait être l’acteur le plus important à l’heure d’impulser un développement durable dans le pays. Ce dont le Mexique a besoin aujourd’hui n’est pas d’accueillir et de mener à ses conséquences ultimes l’ancien modèle de privatisation, mais bien de construire un mouvement social d’opposition fort capable de défendre l’intérêt et les institutions publics à l’heure où les entreprises pétrolières se rapprochent pour profiter des nouvelles « opportunités » dans le pays. Le véritable « décollage » du Mexique, ainsi qu’une économie forte, ne jailliront pas de la privatisation du pétrole, mais de la réponse sociale que cette réforme pourrait entraîner.

Ceux qui défendent la réforme pétrolière au Mexique affirment qu’elle permettra au pays de suivre l’exemple de la Norvège, dont la population a bénéficié des fruits de la production pétrolière dans un contexte impliquant une large participation du secteur privé (6). Mais ce dénouement dépend autant du contexte politique que des réalités économiques. En l’absence d’un Etat fort et animé d’une volonté claire de serrer la vis aux multinationales, une ouverture pétrolière entraînerait probablement de graves problèmes de gouvernabilité et une stagnation économique.

Paradoxalement, c’est le pays qui a montré l’exemple au reste du monde en 1910 avec la première révolution véritablement sociale du XXe siècle qui reste aujourd’hui en retrait de la tendance latino-américaine de revitalisation démocratique avec une « vague rose » de gouvernements décidés à engager une transformation sociale, en Equateur, en Uruguay, en Bolivie, au Venezuela, voire au Brésil ou en Argentine. Au Mexique, le retour au pouvoir du PRI semble, au contraire, annoncer le démantèlement accéléré des conquêtes sociales du siècle dernier. Cependant, bien que la privatisation pétrolière marque la fin d’une époque historique, elle pourrait aussi, comme la chouette de Minerve, signifier le début d’une renaissance sociale, qui permettrait finalement au peuple mexicain d’unir ses forces avec ses frères et sœurs latino-américains dans la transformation politique de l’ensemble du continent américain.

John Mill Ackerman

Chercheur à l’Institut de recherches juridiques de l’Université nationale autonome du Mexique (UNAM) et directeur de rédaction de la Mexican Law Review
(1) Lire José Natanson, «  Et Buenos Aires (re)trouva du pétrole  », Le Monde diplomatique, juin 2012.
(2) «  Repsol-YPF es intervenida y se anuncia su expropiación  », La Razón, Buenos Aires, 17 avril 2012.
(3) Lire Renaud Lambert, «  Carlos Slim, tout l’or du Mexique  », Le Monde diplomatique, avril 2008.
(4) Enrique Méndez, «  Rechazan ciudadanos la inversión privada en Pemex, revela encuesta  », La Jornada, Mexico, 22 juillet 2013.
(5) «  Where protest is likeliest to break out  », The Economist, Londres, 18 novembre 2013.
(6) Ana Leticia Hernández Julián, «  Statoil, Petrobras y Ecopetrol : Tres modelos que el gobierno de México analiza para cambiar a Pemex  », Tiempo Real, Mexico, 21 juin 2013.


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