9 avril 2010

Qui s’intéresse aux modalités du débat public ?

par Eric Lombard

Quand de grands débats comme le débat public nanotechnologies arrivent sur le devant de l’actualité, les polémiques sur la manière dont ils sont organisés vont bon train. Mais quand une proposition de loi visant à « l’organisation du débat public sur les problèmes éthiques et les questions de société » s´invite à l’ordre du jour de l’Assemblée, ça ne semble plus intéresser personne, ou presque. C’est l´association Sciences & Démocratie qui a donné l’alerte et ouvert un débat sur le débat.

Le 16 février dernier, l´Assemblée nationale a adopté en première lecture une proposition de loi de Jean Leonetti relative à « l´organisation du débat public sur les problèmes éthiques et les questions de société ». Elle concrétise les propositions formulées par la Mission d’information sur la révision des lois bioéthiques dans son rapport du 20 janvier 2010. L’objectif est d’institutionnaliser la formule de débat public mise en œuvre lors des Etats généraux de la bioéthique de 2009 : débats locaux animés par les Espaces éthiques régionaux, conférence de citoyens préalablement formés, recueil d´opinions sur un site internet dédié.
La proposition de loi confie au Comité consultatif national d´éthique (CCNE) la responsabilité de décider de l’opportunité d’organiser un débat public en amont du travail parlementaire. Mais elle en fixe les modalités en imposant la tenue de conférences de citoyens.
L’adoption par l’Assemblée nationale de cette très succincte proposition de loi ne s’est pas faite sans débat. Même si tous les orateurs ont souligné la nécessité de favoriser et d’organiser la participation citoyenne, le groupe SRC (Socialiste, Radical, Citoyen) s´est abstenu en regrettant la précipitation avec laquelle cette initiative avait été lancée. De nombreuses insuffisances ont en effet été relevées par les députés de tout bord. Si certaines ont été corrigées par des amendements – en particulier l’implication de L´Office parlementaire d´évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) pour une meilleure articulation entre démocratie participative et représentative –, la plupart n’ont pas trouvé de réponse satisfaisante :
  • Le champ d’application n’est pas assez large. Certains députés souhaiteraient l’étendre à d’autres questions sociales et sociétales que celles « soulevées par les progrès de la connaissance dans les domaines de la biologie, de la médecine et de la santé » : OGM, déchets radioactifs…
  • La forme imposée – états généraux incluant des conférences de citoyens – est trop restrictive. Il y a d’autres manières d’associer le public aux décisions.
  • Les conférences de citoyens ne font pas de place aux corps intermédiaires, aux associations, ni à l’Etat. Elles soulèvent d’autre part un certain nombre de questions : comment assurer la représentativité des citoyens et la légitimité du panel ? Comment donner une formation neutre de qualité aux citoyens en quelques jours ?
  • L’initiative d’organiser des débats devrait être laissée au Parlement. La CCNE ne présente pas de garantie de neutralité suffisante pour organiser des débats, puisqu’elle doit rendre elle-même des avis. Et comment va-t-on articuler le CCNE et la CNDP (Commission nationale de débat public) ?
  • Il ne faut pas tomber dans une « parodie de démocratie » avec des « citoyens alibi ». Les Etats généraux de 2009 ont été un débat d’experts « dirigeant les débats d’en haut », sans « véritable délibération collective ».
Ce débat parlementaire qui a précédé l’adoption des deux articles de loi n’a eu d´écho que dans les Echos. Et du côté de la société civile, si l’association « Sciences et Démocratie » n’avait pas sonné l’alerte, le silence aurait été total. Fondée par Philippe Bourlitio en 2005, elle milite pour faciliter et développer la participation des citoyens aux choix scientifiques et technologiques. Elle a réagi en demandant que la loi soit revue :
  • Elle remet en question le fait que le débat public ne soit envisagé que pour préparer l’examen de projets de loi déjà bien ficelés qui n’autoriseraient plus que des ajustements à la marge.
  • Elle met en lumière le fait que cette proposition de loi ne serait là que pour rendre acceptable la suppression prévue de l’obligation de réviser la loi de bioéthique tous les 5 ans et critique le caractère facultatif du débat public.
  • Elle regrette que le législateur, en donnant tout pouvoir d’initiative au CCNE (Comité consultatif national d´éthique), n’ait pas laissé de place à l’initiative citoyenne.
  • Enfin, sur les modalités du débat, elle ne se satisfait pas du texte qui « en dit trop ou trop peu (…). Ces démarches participatives peuvent présenter des biais de procédures qui en compromettent la régularité. Par exemple, il est possible d´orienter les conclusions des panélistes d´une conférence de citoyens via le choix des formateurs qui leur sont attribués et des personnes qu´elles peuvent consulter. Lors des Etats généraux de la bioéthique 2009, les organisateurs ont fait le choix de ne pas exposer les panélistes aux arguments des militants associatifs, pour éviter que les sentiments qu´ils n´auraient pas manqué d´éprouver lors de ces échanges ne brouillent leur jugement. Ce choix est tout à fait discutable ».
Par la suite, Dorothée Benoit-Browaeys démontre sur Vivagora.org, que cette proposition de loi consacre la prééminence des tenants de la neutralité par rapport à ceux du pluralisme. « Pour les premiers, tout l’argumentaire des militants associatifs est mis hors jeu (hors formation) car il est vu comme susceptible de brouiller le jugement. Pour les seconds, les « savoirs situés » sont tout aussi légitimes que les « connaissances académiques », avec une utilité complémentaire de mise en contexte ».
De son côté, Jacques Testart conclut sur son blog critique de sciences, que « ce texte n’est aucunement une avancée puisque la procédure n’est pas décrite, même grossièrement… ce qui permettra de neutraliser les demandes de véritables CdC (Conventions de citoyens) comme celles que nous souhaitons (Sciences Citoyennes) et de confirmer la fonction de leurre démocratique des propositions de plus en plus fréquentes pour la "participation" des citoyens aux choix de société… »
La proposition de loi est maintenant entre les mains du Sénat. Il est encore temps pour les citoyens de se manifester pour le faire évoluer, sans précipitation. Lors du prochain grand débat, il sera trop tard…

Le polythéisme des marques, nouvelle frontière du 21ème siècle ?

par Thibaud (son site)

Les marques sont les nouveaux dieux antiques. La société de consommation globalisée va basculer dans le polythéisme.

La "marque" est par excellence un concept flou, un signifiant passe-partout, un "mot-valise" comme on dit, quelque chose qui a autant de définitions différentes que de consommateurs. Une marque est comme le reflet imaginaire et idéalisé d’une entreprise ; une entreprise n’étant qu’une organisation sommaire de la production, souvent peu reluisante et marquée par des mécanismes de domination d’une violence pouvant aller jusqu’à l’extrême dans le machisme et la xénophobie, quand bien même cette violence serait sublimée ou sa fondatrice une femme.

D’emblée, dans notre système économique, se pose la question de cette dichotomie fondamentale, entre la marque, idée forte, idéal, cristallisation, repère ; et l’entreprise, système, hiérarchie, bureaucratie, quotidien sale et repoussant. La puissance de la "marque" agit aussi bien sur les employés, via leur fierté et la valeur qu’ils donnent chaque matin à leur travail ; sur les clients, via le désir mimétique et l’acte d’achat, et sur les actionnaires, via les processus de valorisation (si ça pète, ça vaut cher) : elle nous déborde, littéralement, et sans fondement.

En parallèle à cet état de fait, on assiste à un désenchantement du monde, une perte de sens radicale, à une crise économique qui semble n’impliquer que ceux qui en bénéficient, paradoxe ultime et scandaleux. La science, garante du progrès, dépourvue de toute théorie de la subjectivité et encline à survaloriser le critère de l’utilité immédiate, ne peut satisfaire le désir humain.

Si l’on suit et accommode le philosophe Nietzsche dans ces développements libérés des schèmes monothéistes, on peut mieux comprendre cette dichotomie. Je propose ainsi d’établir un parallèle entre la société grecque antique et la société de consommation globalisée. Supposons que l’individu ne vaille jamais beaucoup et que son mérite soit toujours relativement médiocre. Alors, s’il se montre capable de faire émerger une organisation donnant naissance à une véritable marque, on n’y verra que l’expression d’une vérité collective, tout comme l’émergence d’une divinité grecque efface l’auteur de la fiction originelle. On pourra lever le doigt et décider que dans ce cadre, l’entrepreneur ne mérite aucun revenu. Mais c’est alors dire qu’on envie la richesse, et là n’est pas notre visée morale. L’envie est une faiblesse de l’âme, le besoin est du côté du producteur, pas du consommateur.

La valeur immatérielle de l’entreprise, la "marque" donc, va dépasser ses évaluations financières et comptables. Certains l’ont compris dès l’éclatement de la première bulle économique, d’autres ont entendu ensuite le message du dieu Google.

Les marques vont occuper le vide laissé par la mort de Dieu, et ressusciter les dieux mi-hommes mi-idéaux des sociétés antiques. Au-delà des raisonnements purement gestionnaires, on pourra les envisager comme des instruments du changement social.

C’est ce que le "marketing" dit "2.0" annonce : en voulant créer des communautés s’organisant partiellement autour du totem de l’entreprise, il promet l’émergence d’un nouveau polythéisme. La "fanitude" sur facebook en est annonciatrice. Eurostar est un dieu du passage, Google est un oracle, Facebook est un dieu de l’iconographie, etc.

La dite communauté n’est qu’un rassemblement d’humains autour de valeurs religieuses et politiques, organisée autour d’événements significatifs. Oui, nous sommes primitifs.

Et l’on assiste à une démocratisation du branding, l’approche en termes de "marque" ne se réduit pas au "business" : l’artiste devient marque, la personne devient marque, l’écrivain devient marque, ou style. Un ministère devient une marque, une nation devient une marque, une institution devient une marque.

La question qui va se poser à nous est de savoir si nous sommes prêts à accepter ce renouveau polythéiste, ou si nous souhaitons le dépasser. L’action ne sera pas aisée. Si l’apparence et le culte sont fondateurs de la société, si nous ne pouvons y échapper, le changement vers plus de réalité et moins d’illusions ne pourra pas se faire sans douleur. Et les contestataires devront en être conscients pour devenir des leaders.

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5 avril 2010

Nouveau traité START et vieille politique de puissance

par Manlio Dinucci*, Tommaso di Francesco

Alors que les Etats-Unis et la Russie renforcent discrètement leurs budgets et leurs arsenaux nucléaires, ils s’apprêtent à annoncer la signature d’un nouveau traité de réduction de leurs armes stratégiques. Ce fossé entre la réalité et la communication politique n’est pas nouveau. Manlio Dinucci et Tommaso Di Francesco invitent à ne pas en être dupes. Les grandes puissances poursuivent leur ancienne politique.

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Boeing vient d’annoncer qu’il était prêt à produire en 30 mois des missiles globaux hypersoniques. Le projet X-51, aurait été testé avec succès par le constructeur. Selon lui, il permettrait de frapper n’importe quel Etat dans le monde en mois d’une heure. Le Pentagone envisage de dépenser 500 millions de dollars pour en vérifier les capacités, avant d’en passer commande à grande échelle.
Avec le nouveau Traité de réduction des armes stratégiques (Strategic Arms Reduction Treaty — START), qui sera signé le 8 avril à Prague [1], les Etats-Unis et la Russie, les deux plus grandes puissances nucléaires, lancent « un message clair » : ils entendent « guider » la lutte contre la prolifération des armes nucléaires. C’est ce qu’a déclaré le président Obama qui, après avoir scellé l’accord, interviendra le 12 avril à Washington, au sommet du Conseil de sécurité de l’ONU sur la non-prolifération et le désarmement nucléaire. Là, a dit un porte-parole de la Maison Blanche, Obama « pourra montrer des faits et pas seulement des mots ». Quels sont ces faits ?

Selon le Bulletin of the Atomics Scientists, les Etats-Unis possèdent 5 200 têtes nucléaires opérationnelles, c’est-à-dire toujours utilisables ; la Russie, 4 850. En plus de celles-ci, les deux puissances possèdent au total 12 350 têtes non opérationnelles (mais non encore démantelées). Le nouveau START ne limite pas le nombre de têtes nucléaires opérationnelles contenues dans les arsenaux. Il établit seulement une limite pour les « têtes nucléaires déployées », soit celles qui sont prêtes au lancement, installées sur des vecteurs stratégiques de portée supérieure à 5 500 km : des missiles balistiques intercontinentaux avec une base à terre, des missiles balistiques lancés depuis des sous-marins, et depuis des gros bombardiers.

L’incroyable compte

Mais, tandis que les têtes de missiles sont comptées à la pièce, chaque gros bombardier est compté comme une seule pièce même s’il en transporte beaucoup plus. Un B-52 —rappelle le New York Times [2]— transporte 14 missiles de croisière et 6 bombes nucléaires. Ainsi, sur la base d’un compte partiel, le Département d’Etat estime que les USA ont actuellement 1 762 têtes nucléaires déployées sur 798 vecteurs ; la Russie, 1 741 sur 566 vecteurs. Le nouveau START permet à chacune des deux parties de conserver 1 550 têtes nucléaires déployées, soit un nombre à peine inférieur (10 % environ) à l’actuel, et un nombre de vecteurs substantiellement inchangé : 800 chacun, dont 700 prêts au lancement à tout instant. Un potentiel destructif capable de balayer l’espèce humaine et quasiment toute autre forme de vie sur la Terre.

En outre le nouveau traité n’indique aucune limite effective à l’augmentation qualitative des forces nucléaires. Aux Etats-Unis, les responsables des laboratoires nucléaires ont déjà averti le Congrès que le programme fédéral pour « l’extension de la vie de l’arsenal nucléaire » ne suffit pas à en garantir la fiabilité dans les prochaines décennies. Ils font ainsi pression pour créer une « coûteuse nouvelle génération de têtes nucléaires » [3] et le vice-président Joseph Biden leur a promis à cet effet 5 milliards de dollars de plus. On est en train de développer en même temps de nouveaux vecteurs, tel que le « missile global hypersonique » de Boeing qui pourrait devenir opérationnel en moins de trois ans : il permettrait au Pentagone de frapper en une heure n’importe quel objectif dans n’importe quelle partie du monde. Reste aussi en dehors du traité la question des armes nucléaires « tactiques », que les USA continuent à conserver dans cinq pays « non nucléaires » de l’OTAN (Belgique, Allemagne, Italie, Hollande et Turquie) et dans d’autres, en violant ainsi le Traité de non-prolifération.

Le « Bouclier » sans freins

En même temps, le nouveau START ne met aucune limite au nouveau projet de « bouclier » anti-missiles que les USA veulent étendre à l’Europe, à la frontière du territoire russe : système non pas de défense mais d’attaque qui, une fois mis au point, leur permettrait de lancer une première frappe ( first strike), en se fiant à la capacité du « bouclier » de neutraliser les effets de représailles [4]. A Washington, on assure que le « bouclier » n’est pas dirigé contre la Russie mais contre la menace de missiles iraniens. A Moscou on le prend au contraire pour une tentative de prendre un avantage stratégique décisif sur la Russie [5]. Le général Nikolaï Makarov, chef d’état major interarmes russe, a donc averti que, si les USA continuent à développer le « bouclier », cela « amènera inévitablement à une nouvelles phase de la course aux armements, en minant l’essence même du traité sur la réduction des armes nucléaires » [6]. En attendant Moscou ne reste pas les bras croisés : en mai sera lancé le nouveau sous-marin multifonctions Yasen à propulsion nucléaire, armé de 24 missiles de croisière à longue portée, y compris à tête nucléaire.

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Le premier exemplaire du Projet 885 (dit Yassen, c’est-à-dire le frêne, dans la classification OTAN) pourrait être lancé le 7 mai prochain à l’occasion de la célébration de la victoire de la Grande Guerre patriotique (c’est-à-dire de la Seconde Guerre mondiale). Ce sous-marin russe nucléaire d’attaque de 4e génération aurait une technologie plus sophistiquée encore que les Seawolf états-uniens. Il serait polyvalent et particulièrement adapté au combat littoral.

C’est avec ces faits que le président Obama se présentera le 12 avril au Conseil de sécurité, en exhibant le nouveau START qui confère aux deux plus grandes puissances nucléaires, détentrices de 95 % des plus de 23 000 armes nucléaires existant dans le monde, le droit de « guider » la lutte contre la prolifération des armes nucléaires. Le doigt accusateur sera pointé sur l’Iran (comme le confirme la rencontre Obama-Sarkozy du 31 mars), accusé de vouloir fabriquer la bombe atomique, tandis qu’on laissera à coup sûr dans l’ombre le fait qu’Israël possède un arsenal de centaines d’armes nucléaires, qu’il garde pointées sur d’autres pays de la région.

 Manlio Dinucci

Géographe et géopolitologue. Derniers ouvrages publiés : Geograficamente. Per la Scuola media (3 vol.), Zanichelli (2008) ; Escalation. Anatomia della guerra infinita, DeriveApprodi (2005).


Un monde toujours plus urbain

jeudi 1er avril 2010, par Philippe Rekacewicz

Un complément cartographique à notre dossier « Mégapoles à l’assaut de la planète », paru dans le numéro d’avril 2010 du Monde diplomatique (en kiosques).

« La population urbaine dans le monde, qui a atteint 3,4 milliards de personnes, égale pour la première fois de l’histoire à la population rurale », indiquait l’ONU dans un communiqué laconique publié en avril 2008. Théoriquement, la population urbaine dépassait la barre des 50 %. Théoriquement, car encore faudrait-il être sûr de savoir exactement qui est « urbain » et qui est « rural », tant les définitions diffèrent selon les pays. La frontière entre le monde urbain et rural n’est pas une ligne nette, c’est presque toujours un large espace de transition.

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Taux de croissance moyen de la population urbaine
entre 1990 et 2006

Dans ce qu’on pourrait appeler la « transition urbaine », les pays riches sont dans une phase ultime, avec une population urbaine déjà largement majoritaire, mais des taux de croissance très faibles, voire nuls. A l’opposé, les pays en voie de développement restent dans une phase précoce, avec une population majoritairement rurale (à l’exception de l’Amérique latine, traditionnellement et historiquement urbaine), mais des taux de croissance très élevés, qui les entraînent vers une urbanisation incontrôlée. Quant aux pays ex-communistes, la crise profonde qui a suivi l’effondrement du bloc soviétique y a provoqué un recul de la population urbaine, avec, dans presque tous les cas, un retour à la terre.

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Grandes agglomérations mondiales

Le développement rapide des villes géantes est la conséquence la plus spectaculaire de la métropolisation du monde. Les perspectives de croissance pour 2025 ne sont pas les mêmes selon les continents. Quasi-nul en Europe, le taux de croissance est très faible sur tout le continent américain. En revanche, il explose en Afrique et en Asie, où les chiffres donnent le vertige. Selon les estimations de l’ONU, Tokyo devrait atteindre 36 millions d’habitants en 2025, Djakarta 32 millions, Manille 30 millions, New Delhi 29 millions, Bombay 28 millions et Shanghaï 23 millions, pour ne citer que les plus importantes.

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Population des bidonvilles

L’urbanisation « trop » rapide des pays en voie de développement se fait dans la douleur. D’après l’agence ONU-Habitat, la population vivant dans des bidonvilles (en général sans accès à l’eau potable ni aux infrastructures d’assainissement — lire « Le tabou des excréments, péril sanitaire et écologique », dans Le Monde diplomatique de janvier 2010) est passée de 780 millions en 2000 à près de 830 millions en 2010, soit plus d’un tiers de la population urbaine totale des pays les plus pauvres (mais largement plus de la moitié pour le continent africain et environ 50 % pour l’Asie du Sud).

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Le ralentissement de la croissance urbaine

Selon les prévisions de l’ONU, la population urbaine continuera à progresser au cours des prochaines années, mais à un rythme de moins en moins élevé, jusqu’à se stabiliser, comme elle l’a fait en Europe depuis le début des années 2000.

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Au Honduras, la normalisation par la guerre sale

Par Jean Ortiz , jeudi 1er avril 2010

Depuis la farce électorale du 29 novembre 2009 destinée à blanchir le coup d’Etat militaire du 28 juin contre le président Manuel Zelaya, la « médiacratie » a bien fait les choses : avec la bénédiction des Etats-unis et de l’Europe, le Honduras aurait retrouvé la démocratie.

Or, voilà que les masques du prétendu « gouvernement de réconciliation nationale » tombent. Comme dans les années 1980, le pouvoir a entrepris une campagne de liquidation sélective des militants et dirigeants du Front national de résistance populaire (FNRP), à travers des escadrons de la mort qui sévissent en toute impunité. Le 23 mars, le professeur Manuel Flores a été abattu dans son établissement, San José de Pedregal, devant ses élèves et collègues. Dirigeant syndical du Collège des professeurs de l’enseignement secondaire, il était également membre du Parti socialiste centraméricain. Le 26 mars, des journalistes du Canal 4 de Juticalpa, Ballardo Mairena et Manuel Juarez, ont été criblés de balles par des hommes armés qui leur avaient tendu une embuscade. Ces deux morts s’ajoutent aux cinq journalistes assassinés en quelques mois par le régime du président Porfirio Lobo.

Le 25 mars, onze dirigeants syndicaux de l’Enseignement supérieur de l’Université nationale autonome du Honduras (UNAH) ont été arrêtés, ligotés et enchaînés comme des malfrats. Dans le département d’Atlantidá, cinq paysans ont été abattus depuis le début de l’année, dont José Antonio Cardoza et José Carias, du Mouvement unifié des paysans d’Aguán (Muca). Le défenseur de la forêt, Francisco Castillo, a également été liquidé.

La haut-commissaire aux droits de l’homme de l’Organisation des Nations unies (ONU), Mme Naty Pillay, a demandé le 15 mars que s’ouvre une enquête sur « les cas de violations du droit à la vie, torture, arrestations arbitraires et viols » au Honduras.

Le coup d’Etat préventif du 28 juin 2009 était bien un avertissement à tous les peuples d’Amérique latine, une tentative de coup d’arrêt, d’intimidation envers l’Alliance bolivarienne pour les peuples de notre Amérique (ALBA), et visait à refaire du Honduras le gendarme américain en Amérique centrale.

Renforcée, plurielle, inventive, non-violente, l’opposition hondurienne, rassemblée au sein du FNPR, ne désarme pas. Elle va entreprendre, d’avril à juin, une grande consultation nationale pour recueillir les signatures de 30 % des électeurs en vue d’exiger une Assemblée constituante débouchant sur la refondation du pays, par l’élaboration d’une constitution ayant désormais pour garant le peuple et non l’armée et l’oligarchie.

L’Union européenne se tait ; elle a repris tant ses relations avec Tegucigalpa que les négociations commerciales avec l’ensemble de l’Amérique centrale – dont fait partie le Honduras – pour signer en mai prochain un traité de libre commerce.

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Pax americana ou la conquête militaire de l'espace

Comment, grâce aux satellites, les États-Unis ont entrepris de contrôler la Terre « d’en haut » et de militariser l’espace. Une enquête terrifiante, à regarder tant qu’il en est encore temps.



Le film


C’était à la fin des années 1950 : l’URSS et les États-Unis lançaient leurs premiers satellites dans l’espace. Un demi-siècle plus tard, ces bijoux technologiques sont devenus indispensables au bon fonctionnement de nos sociétés interconnectées. Sur eux repose la gestion de nos communications (télévision, téléphone portable…) comme celle de nos économies (cartes de crédit, activités boursières…), la prévision météorologique (cyclones, sécheresses…), les appareils de positionnement (GPS, trafic aérien…), la récolte de données (sur les gisements de matières premières, la pollution, le réchauffement climatique…), etc. Un réseau fragile sans lequel tout cesserait instantanément de fonctionner. Parallèlement, les satellites sont devenus un formidable moyen de surveillance des activités politiques, commerciales et militaires. Les contrôler devient un enjeu capital. Au nom de la pax americana – par référence à la pax romana, doctrine selon laquelle la puissance dominante se doit d’assurer la paix du monde –, les États-Unis se sont lancés dans une politique visant à empêcher leurs adversaires (mais aussi leurs alliés) de leur faire concurrence « là-haut ». L’enjeu ? Monopoliser l’espace pour contrôler la Terre « en bas »…

FOLAMOUR PAS MORT
Fruit de cinq années d’enquête, le documentaire de Denis Delestrac montre que la perspective de voir la Terre contrôlée depuis l’espace ne relève plus du domaine de la science-fiction. Le rêve de Wernher von Braun, l’ancien concepteur des missiles nazis, qui fut l’un des dirigeants de la Nasa de 1958 à 1972, a accompagné chaque administration américaine depuis la Seconde Guerre mondiale et prend forme aujourd’hui. Celui qui servit de modèle au Docteur Folamour de Kubrick n’avait pas les moyens de mettre en œuvre sa folie. Mais désormais, la technologie nécessaire pour militariser l’espace existe. Le complexe militaro-industriel des États-Unis s’y attelle (les projets de « guerre des étoiles » et de « bouclier antimissile » ont permis de lever des milliards de dollars) et les principales « nations spatiales » s’efforcent d’y prendre un avantage décisif. Pax americana tente de saisir ce moment charnière de l’histoire militaire et géopolitique. Des machines de guerre sont-elles déjà en orbite ? Des traités peuvent-ils préserver l’espace du surarmement ? Le monde doit-il capituler devant un « superflic » mondial (les États-Unis possèdent près de 50 % des satellites en activité) ? Grâce à d’étonnantes archives et surtout en faisant pénétrer pour la première fois une caméra dans le Centre de commandement spatial de l’US Air Force, Pax americana révèle les forces en présence. Généraux, analystes des politiques spatiales, politiques, « faucons » et activistes font un état des lieux du nouveau déséquilibre des forces et de ses conséquences. « Nous vivons une époque très très dangereuse, conclut le comédien et activiste Martin Sheen. Mais les gens sont absorbés par les difficultés de leur vie quotidienne. Ce n’est pas facile de réclamer leur attention pour dire : "Attendez, vous croyez que ça va mal ? J’ai une nouvelle pour vous : c’est pire que vous ne croyez !" »

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PAX AMERICANA
Ou la conquête militaire de l'espace
Documentaire de Denis Delestrac (France/Canada, 2009, 1h16mn)
Coproduction : ARTE France, In Fine Films, Lowik & Coptor Inc.

Lait : Santé, Mensonges et Propagande

par Bubul01


Après son livre "Santé, Mensonges et Propagande", Thierry Souccar revient spécialement sur le lait et le lobby laitier qui nous vante à longueur de temps les bienfaits du lait et surtout son caractère indispensable tout au long de la vie. Thierry Souccar démontre que ce n’est pas le cas et que durant des millions d’années d’évolution, l’homme s’est passé de lait après le sevrage sans problème, et que le lait pourrait grandement favoriser des maladies qu’il permet prétendument pourtant d’éviter comme l’ostéoporose et autres allergies.

Le livre commence par une histoire de la montée en puissance du lait et du lobby laitier, qui commença en Amérique puis déferla en France. Ce qui fut décisif en France fût la décision de forcer les millions d'élèves en leur imposant de boire du lait à l'école, d'une part pour les habituer au lait dès leur plus tendre enfance et pour remplacer le lait par l'alcool. Donc au lieu de remédier aux causes des addictions à l'alcool, on en profite pour remplacer l'alcool par le lait pour faire le bonheur de l'industrie au lieu d'aider les alcooliques et les gens à ne plus être victimes d'addictions !
Ce qui est sidérant est que l'industrie laitière n'a visiblement pas non plus compris que le bébé a besoin de lait de sa mère et non d'une vache (ces laits n'ont pas du tout la même composition) et que ce besoin disparaît ensuite lorsque le système digestif de l'enfant est complètement développé.
Interview de Thierry Souccar sur ce livre :
Voir la vidéo :

Les Manipulations de l'Industrie Laitière

Les industries alimentaires considèrent leur produits comme des biens de consommation qui sont régis par les mêmes règles de marketing que les autres, c'est à dire enjoliver, exagérer les bienfaits du produit en ne parlant que des aspect positifs, et en éludant les parties négatives du produit, qu'on appelle « effets secondaire indésirables » pour les médicaments.
Par exemple pour l'aspartame, les industriels nous expliquent que cette molécule est présente naturellement dans les fruits, en oubliant de préciser que dans les fruits, elle y est présente mais avec d'autres molécules qui neutralisent ses effets nocifs.
Dans le cas du lait l'industrie fait l'autruche en essayant de faire croire qu'on refuse de reconnaître les besoins en calcium que seul le lait pourrait nous apporter, en évitant soigneusement de reconnaître aussi les effets négatifs possibles du lait. Les besoins en lait sont exagérés, parce qu'ils sont évalués pour boucher en fait une « fuite de calcium » due à un mauvais équilibre alimentaire plutôt que de remédier à ce qui cause cette fuite. Cela revient à essayer de remplir un puit sans fond !
Et comme toujours, les études favorables aux produits laitiers qui ne lui voient pas d'aspect négatif ou dangereux sont en majorité des études financée par l'industrie laitière elle même qui ne parle que d'un petit aspect positif, en évitant de montrer les aspects négatifs.
Les recommendations de santé officielles sont elles aussi basée en grande partie sur les informations fournies par ces mêmes industries alimentaires qui ont tout intêret à exagérer les besoins pour que l'on en consomme plus qu'il n'en faut, puisque de toute façon ce n'est pas elle qui va payer le coût de la prise en charge des « malades du lait » ou des autres problèmes dus à la surconsommation. Leur seul but est d'augmenter la consommation pour augmenter leur profit, la santé n'est qu'un de leur prétextes pour y arriver.
Conclusion
T.Souccar explique en quoi la surconsommation de lait pourrait grandement favoriser de nombreuses maladies comme le diabète ou même l'ostéoporose contrairement à ce que dit la propagande laitière. Peut être êtes vous intoxiqués au lait sans même le savoir !
Pour plus de détails et d'explications, veuillez évidemment vous référer au livre.
Si vous décidez de vous procurer le livre, prenez la dernière édition qui est mis à jour avec des questions réponses de lecteurs et les réponses de T.Souccar aux critiques de l'industrie laitière.
Références du Livre :
Informations sur le lait de vache :
Voir aussi ces articles sur la toxicité de l'alimentation moderne :
Sites Intéressants sur l'alimentation :

Les médias reflètent-ils la réalité du monde ?

Dans quelle mesure les médias constituent-ils un miroir fidèle du monde ? Depuis que les nouvelles technologies ont bouleversé le journalisme et permis la constitution de grands groupes médiatiques aux ambitions planétaires, cette question devient plus pertinente que jamais. L’instantanéité et le direct ont bouleversé les conditions d’enquête. Et l’impératif du profit a remplacé les plus nobles exigences civiques. Mais partout, un autre journalisme, plus soucieux de vérité et de rigueur, résiste, comme on le constate en Iran, au Burkina, en Algérie et ailleurs...

Par Ryszard Kapuscinski

Dans les débats sur les médias, on accorde une attention excessive aux problèmes techniques, aux lois du marché, à la concurrence, aux innovations et à l’audience. Et une attention insuffisante aux aspects humains. Je ne suis pas un théoricien des médias, mais un simple journaliste, un écrivain qui, depuis plus de quarante ans, se consacre à recueillir et à traiter l’information (et aussi à la consommer). J’aimerais faire part des conclusions auxquelles je suis parvenu au terme de ma longue expérience.

Ma première observation concerne les dimensions. Affirmer, comme on le fait souvent, que « toute l’humanité » est suspendue à ce que font ou disent les médias est une exagération. Même quand des événements, comme l’ouverture des Jeux olympiques, sont regardés par deux milliards de téléspectateurs, ceux-ci ne représentent qu’un tiers de la population de la planète. D’autres méga-événements (Coupe du monde de football, guerres, mariages ou obsèques de personnalités) sont massivement diffusés sur les écrans, et à peine 10 % ou 20 % des humains les regardent. Cela représente certes de gigantesques foules, mais certainement pas « toute l’humanité ». Des centaines de millions de personnes n’ont aucun contact avec les médias. Dans diverses régions d’Afrique, la télévision, la radio et même les journaux sont inexistants. Au Malawi, il n’y a qu’un journal ; au Liberia, deux, assez médiocres d’ailleurs, mais pas de télévision.

Dans de nombreux pays, la télévision ne fonctionne que deux ou trois heures par jour. Et dans de vastes étendues d’Asie - par exemple en Sibérie, au Kazakhstan ou en Mongolie -, il y a certes des relais de télévision, mais les gens disposent de récepteurs TV qui ne leur permettent pas de capter les programmes. A l’époque de Leonid Brejnev, dans les grands espaces de la Sibérie soviétique, les programmes des radios occidentales n’étaient même pas brouillés parce que, faute de récepteurs, nul ne pouvait les écouter.

Une grande partie de l’humanité vit encore hors de l’influence des médias et n’a nulle raison de s’inquiéter des manipulations médiatiques éventuelles ou de la mauvaise influence des médias de masse.

Souvent, en particulier en Amérique latine et en Afrique, l’unique fonction de la télévision est de divertir. On trouve donc des téléviseurs dans les bars, les restaurants et les hôtels. Les gens ont l’habitude d’aller au bar pour prendre un verre et regarder la télé. Et il ne viendrait à personne l’idée d’exiger que ce média soit sérieux ou ait une quelconque fonction d’information ou d’éducation. La plupart des Africains ou des Latino-Américains n’attendent pas de la télévision une interprétation sérieuse du monde, pas plus que nous-mêmes ne l’attendrions d’un cirque.

La grande révolution des nouvelles technologies est un phénomène récent. Sa première conséquence importante a été un changement radical dans l’univers du journalisme. Songeons au premier sommet des chefs d’Etat d’Afrique. Il s’est tenu en 1963 à Addis-Abeba (Ethiopie). Pour le couvrir, des journalistes étaient venus du monde entier. Environ deux cents envoyés spéciaux et correspondants de grands journaux internationaux, d’agences de presse et de stations de radio. Quelques équipes tournaient pour les actualités cinématographiques, mais il n’y avait pas une seule équipe de télévision. Nous nous connaissions tous ; nous savions ce que faisait chacun et nous étions même amis. D’authentiques maîtres de la plume et de véritables experts de grandes questions internationales étaient présents. Quand j’y pense, et sans nulle nostalgie d’un âge d’or qui n’a jamais existé, il me semble que c’était la dernière grande réunion des reporters du monde, la fin d’une époque héroïque où le journalisme était considéré comme une profession réservée aux meilleurs, une vocation élevée, noble, à laquelle l’intéressé se consacrait pleinement, pour la vie.

Depuis, tout a changé. La quête et la diffusion d’informations est devenue une occupation pratiquée, dans chaque pays, par des milliers de personnes. Les écoles de journalisme se sont multipliées, formant année après année de nouveaux venus dans la profession. Cela n’a plus rien à voir. Autrefois, le journalisme était une mission, pas une carrière. Aujourd’hui, on ne compte plus les individus qui pratiquent le journalisme sans s’identifier à cette profession ou sans avoir décidé de lui consacrer pleinement leurs vies et le meilleur d’eux-mêmes. C’est, pour certains, une sorte de hobby, qu’ils peuvent abandonner à tout moment pour faire autre chose. De nombreux journalistes actuels pourraient travailler demain dans une agence de publicité et devenir, après-demain, agents de change.

Les technologies de pointe ont provoqué une multiplication des médias. Quelles en sont les conséquences ? La principale, c’est la découverte que l’information est une marchandise dont la vente et la diffusion peuvent rapporter d’importants profits. Naguère, la valeur de l’information était associée à divers paramètres, en particulier celui de la vérité. Elle était aussi conçue comme une arme favorisant le combat politique. Le souvenir est encore vif des étudiants qui, à l’époque du communisme, brûlaient dans la rue des exemplaires des journaux du parti aux cris de « La presse nous ment ! ». Aujourd’hui, tout a changé. Le prix d’une information dépend de la demande, de l’intérêt qu’elle suscite. Ce qui prime, c’est la vente. Une information sera jugée sans valeur si elle n’est pas en mesure d’intéresser un large public.

La découverte de l’aspect mercantile de l’information a déclenché l’afflux du grand capital vers les médias. Les journalistes idéalistes, ces doux rêveurs en quête de vérité qui dirigeaient auparavant les journaux, ont été souvent remplacés, à la tête des entreprises de presse, par des hommes d’affaires.

Tous ceux qui visitent les rédactions des supports les plus divers peuvent aisément constater ce changement. Jadis, les médias étaient installés dans des immeubles de seconde catégorie et disposaient de bureaux étroits, sombres et mal aménagés, où grouillaient des journalistes dépenaillés et sans le sou, entourés de montagnes de dossiers en désordre, de journaux et de livres. Aujourd’hui, il suffit de visiter les locaux d’une grande chaîne de télévision : les immeubles sont de somptueux palais, tout en marbre et en miroirs. Le visiteur est guidé par des mannequins-hôtesses à travers de longs couloirs calfeutrés. Ces palais sont désormais le siège d’un pouvoir dont seuls disposaient naguère les présidents des Etats ou les chefs de gouvernement. Ce pouvoir est maintenant entre les mains des patrons des nouveaux groupes médiatiques.

C’est le marché qui vérifie

Depuis qu’elle est considérée comme une marchandise, l’information a cessé d’être soumise aux critères traditionnels de la vérification, de l’authenticité ou de l’erreur. Elle est maintenant régie par les lois du marché. Cette évolution est la plus significative parmi toutes celles qui ont affecté le domaine de la culture. Conséquence : on a substitué aux anciens héros du journalisme un nombre imposant de travailleurs des médias, pratiquement tous plongés dans l’anonymat. La terminologie utilisée aux Etats-Unis est révélatrice de ce phénomène : le media worker y supplante fréquemment le journalist.

Le monde des médias a explosé de telle manière qu’il commence à vivre pour lui-même, comme une entité autosuffisante. La guerre interne que se livrent les groupes médiatiques est devenue une réalité plus intense que celle du monde qui les entoure. D’importantes équipes d’envoyés spéciaux parcourent le monde. Elles forment une grande meute au sein de laquelle chaque reporter surveille l’autre. Il faut avoir l’information avant le voisin. Le scoop ou la mort. C’est ainsi que, même si plusieurs événements se produisent simultanément dans le monde, les médias n’en couvriront qu’un : celui qui aura attiré toute la meute.

Plus d’une fois, j’ai fait partie de cette meute. Je l’ai d’ailleurs décrite dans mon livre D’une guerre l’autre (1) et je sais comment elle fonctionne. La crise provoquée, en 1979, par la prise d’otages américains à Téhéran en est un exemple. Bien que, dans la pratique, il ne se passait rien dans la capitale de l’Iran, des milliers d’envoyés spéciaux venus du monde entier sont restés des mois durant dans cette ville. La même meute s’est déplacée, quelques années plus tard, dans le Golfe, durant la guerre de 1991, même si, sur place, elle ne pouvait rien faire, les Américains interdisant à quiconque d’approcher du front. Au même moment, au Mozambique et au Soudan, des événements atroces se produisaient ; mais cela n’émouvait personne, puisque la meute se trouvait dans le Golfe. En décembre 1991, lors du coup d’Etat, la Russie eut droit aux mêmes égards. Tandis que les faits véritablement importants, les grèves et les manifestations, se déroulaient à Leningrad, le monde l’ignorait car les envoyés de tous les médias ne bougeaient pas de la capitale, attendant qu’il veuille bien se passer quelque chose à Moscou, où régnait un calme absolu.

Les nouvelles technologies, surtout le téléphone mobile et le courrier électronique, ont transformé radicalement les relations entre les reporters et leurs chefs. Auparavant, l’envoyé d’un journal, le correspondant d’une agence de presse ou d’une chaîne de télévision disposait d’une grande liberté et pouvait donner libre cours à son initiative personnelle. Il recherchait l’information, la découvrait, la vérifiait, la sélectionnait et la mettait en forme. Actuellement, et de plus en plus souvent, il n’est qu’un simple pion que son chef déplace à travers le monde depuis ses bureaux, qui peuvent se trouver à l’autre bout de la planète. Ce chef, de son côté, dispose, à sa portée, des informations provenant d’une multitude de sources (chaînes d’informations en continu, dépêches d’agences, Internet) et peut ainsi avoir sa propre appréciation des faits, éventuellement fort différente de celle du reporter qui couvre l’événement sur place.

Parfois, le chef ne peut attendre patiemment que le reporter termine son travail. C’est donc lui qui informe le reporter du développement des événements, et la seule chose qu’il attend de son envoyé spécial, c’est la confirmation de l’idée qu’il s’est déjà faite sur cette affaire. Beaucoup de reporters ont désormais peur de rechercher la vérité par eux-mêmes.

Au Mexique, un de mes amis travaillait pour les chaînes de télévision américaines. Je l’ai rencontré en pleine rue ; il était en train de filmer des affrontements entre les étudiants et la police. « Qu’est-ce qui se passe, John ? », lui demandai-je. « Je n’en ai pas la moindre idée, me répondit-il sans cesser de filmer. Je ne fais qu’enregistrer, je me contente de saisir les images ; ensuite je les envoie à la chaîne, qui fait ce qu’elle veut de ce matériel. »

L’ignorance des envoyés spéciaux sur les événements qu’ils sont chargés de décrire est parfois stupéfiante. Lors des grèves de Gdansk en août 1981, qui virent naître le syndicat Solidarité, la moitié des journalistes étrangers venus en Pologne couvrir l’événement ne pouvaient pas situer Gdansk (l’ancienne Dantzig) sur une mappemonde. Ils en savaient encore moins sur le Rwanda, lors des massacres de 1994 : la plupart d’entre eux posaient le pied sur le continent africain pour la première fois et avaient débarqué directement sur l’aéroport de Kigali, d’avions affrétés par l’ONU, en sachant à peine où ils se trouvaient. Presque tous ignoraient les causes et les raisons du conflit.

Mais la faute n’incombe pas aux reporters. Ils sont les premières victimes de l’arrogance de leurs patrons, des groupes médiatiques et des grands réseaux de télévision. « Que peuvent-ils exiger encore de moi ?, me disait récemment le cameraman de l’équipe d’une grande chaîne de télévision américaine. En une seule semaine, j’ai dû filmer dans cinq pays sur trois continents différents ! »

Cette métamorphose des médias soulève une question fondamentale : comment comprendre le monde ? Jusqu’à maintenant, on apprenait l’histoire grâce au savoir que nous laissaient nos ancêtres, à ce que contenaient les archives et à ce que découvraient les historiens. Aujourd’hui, le petit écran est devenu la nouvelle (et pratiquement unique) source de l’histoire, distillant la version conçue et développée par la télévision. Alors que l’accès aux documents reste difficile, la version que diffuse la télévision, incompétente et ignorante, s’impose sans que nous puissions la contester. L’exemple le plus éclairant de ce phénomène est peut-être le Rwanda, pays que je connais bien. Des centaines de millions de personnes dans le monde ont vu les images des victimes des tueries ethniques avec des commentaires pour la plupart complètement erronés. Combien de téléspectateurs ont-ils complété cette vision en se reportant à des ouvrages fiables sur le Rwanda ? Le danger, c’est qu’on consomme beaucoup plus facilement les médias que les livres.

La civilisation devient de plus en plus dépendante de la version de l’histoire imaginée par la télévision. Une version souvent fausse et sans fondement. Le téléspectateur de masse, au fil du temps, ne connaîtra plus que l’histoire « téléfalsifiée », et seul un tout petit nombre de personnes auront conscience qu’il existe une autre version, plus authentique, de l’histoire.

Rudolph Arnheim, grand théoricien de la culture, avait déjà prédit, dans les années 30, dans son livre Film as Art (2), que l’être humain confondrait le monde perçu par ses sensations et le monde interprété par la pensée, et croirait que voir c’est comprendre. Mais cela est faux. La télévision, a écrit Arnheim, « sera un examen des plus rigoureux pour notre connaissance. Elle pourra enrichir nos esprits, comme elle pourra les rendre léthargiques ». Il avait raison.

La confusion, en général inconsciente, entre voir et savoir, et voir et comprendre est utilisée par la télévision pour manipuler les gens. Dans une dictature, on se sert de la censure ; dans une démocratie, de la manipulation. La cible de ces agressions est toujours la même : le citoyen ordinaire. Lorsque les médias parlent d’eux-mêmes, ils masquent le problème de fond par la forme, ils substituent la technique à la philosophie. Ils se demandent comment éditer, comment rédiger ou comment imprimer. Ils discutent des problèmes de montage, des bases de données ou de la capacité des disques durs. En revanche, il n’est guère question du contenu de ce que l’on veut éditer, rédiger ou imprimer. Le problème du messager est remplacé par celui du message. Malheureusement, comme le regrettait Marshall McLuhan, le messager a tendance à devenir le contenu du message.

Prenons l’exemple de la pauvreté dans le monde, qui est, sans doute, le problème majeur de cette fin de siècle. Comment est-il traité par les grands réseaux de télévision ? La première manipulation consiste à présenter la pauvreté comme synonyme du drame de la faim. Or les deux tiers de l’humanité vivent dans la misère en raison d’une répartition inéquitable des richesses dans le monde. La famine, en revanche, apparaît à certains moments et dans des régions très précises car c’est un drame généralement de dimension locale. De plus, ses causes sont dues, la plupart du temps, à des cataclysmes comme la sécheresse ou les inondations ; et parfois aussi à des guerres. Il faut ajouter que les mécanismes de lutte contre la faim, en tant que fléau imprévu et ponctuel, sont relativement efficaces. Pour la combattre, on utilise les excédents alimentaires dont disposent les pays riches et on les envoie massivement là où le besoin se fait sentir. Ce sont ces opérations de lutte contre la faim, comme au Soudan ou en Somalie, que l’on nous présente sur les écrans de télévision. En revanche, pas une parole n’est prononcée sur la nécessité d’éradiquer la misère mondiale.

Le second stratagème utilisé par les manipulateurs de la misère est sa présentation dans les émissions de caractère géographique, ethnographique et touristique, qui font découvrir des régions exotiques de la planète. De cette manière, la misère est assimilée à l’exotisme, et la télévision fait passer le message que les lieux de prédilection de la misère sont les régions exotiques. Vue sous cet angle, la misère apparaît comme un phénomène curieux, une attraction quasi touristique. De telles images abondent particulièrement sur des chaînes thématiques comme Travel, Discovery, etc.

La dernière ruse de ces manipulateurs consiste à présenter la misère comme une donnée statistique, un paramètre banal du monde réel. Une telle conception de la misère la voue à la pérennité ; l’être humain ne peut donc la ressentir que comme une menace pour la civilisation puisqu’il lui faut apprendre à vivre avec.

Revenons au point de départ : les médias reflètent-ils le monde ? De manière, hélas, très superficielle et fragmentaire. Ils se concentrent sur les visites présidentielles ou les attentats terroristes ; et même ces thèmes semblent moins les intéresser. Durant ces quatre dernières années, l’audience des journaux télévisés des trois principales chaînes américaines est tombée de 60 % à 38 % du total des téléspectateurs. 72 % des sujets sont de caractère local et traitent de la violence, de drogues, d’agressions et de délits. Seuls 5 % de leur temps sont consacrés aux nouvelles de l’étranger ; et de nombreuses éditions font même l’impasse sur ce domaine. En 1987, l’édition américaine de l’hebdomadaire Time a consacré onze couvertures à des thèmes internationaux ; dix ans plus tard, en 1997, seulement une. La sélection des informations est basée sur le principe « plus il y a de sang, mieux ça se vend (3) ».

Nous vivons dans un monde paradoxal. D’une part, on nous dit que le développement des moyens de communication a relié toutes les parties de la planète entre elles pour former un « village global » ; et, d’autre part, la thématique internationale occupe de moins en moins d’espace dans les médias, occultée par l’information locale, par les titres à sensation, par les ragots, le people et toute l’information-marchandise.

Mais, soyons justes, la révolution des médias est en plein essor. Il s’agit d’un phénomène récent dans la civilisation humaine ; trop récent pour que celle-ci ait déjà pu produire les anticorps nécessaires pour combattre les pathologies qu’il génère : la manipulation, la corruption, l’arrogance, la vénération de la pornographie. La littérature sur les médias est parfois très critique, souvent même implacable. Tôt ou tard, cette critique influencera, au moins en partie, le contenu des médias.

En outre, il faut reconnaître que beaucoup de gens s’assoient devant leur téléviseur parce qu’ils espèrent voir exactement ce que la télévision leur offre. Déjà, dans les années 30, le philosophe espagnol Ortega y Gasset écrivit dans son livre La Rébellion des masses que la société est une collectivité de personnes satisfaites d’elles-mêmes, de leurs goûts et de leurs choix.

Enfin, le monde des médias est divers. C’est une réalité à plusieurs étages. A côté des « médias-poubelles », il y en a d’autres, formidables : il existe quelques prodigieux programmes de télévision, d’excellentes émissions de radio et de remarquables journaux. Pour qui désire réellement une information honnête, de réflexion approfondie et fondée sur de solides connaissances, les médias de qualité ne manquent pas. Il est parfois plus difficile de disposer du temps nécessaire pour assimiler l’offre existante. Les médias sont fréquemment vilipendés pour justifier la léthargie dans laquelle sont plongées nos propres consciences et notre passivité.

Et nul n’ignore que, dans les rédactions des journaux, dans les studios de radio et de télévision, il y a des journalistes sensibles et de grand talent, des gens qui ont de l’estime pour leurs contemporains, qui considèrent que notre planète est un lieu passionnant, qui vaut la peine d’être connu, compris et sauvé. La plupart du temps, ces journalistes travaillent en faisant preuve d’abnégation et de dévouement, avec enthousiasme et esprit de sacrifice,

renonçant aux facilités, au bien-être, jusqu’à négliger leur sécurité personnelle. Avec, pour unique objectif, de témoigner du monde qui nous entoure. Et de la multitude de dangers et d’espoirs qu’il recèle.

Ryszard Kapuscinski.


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Ryszard Kapuscinski

Ecrivain et journaliste polonais, auteur, entre autres, de : Le Négus (Flammarion, 1994), Le Shah (Flammarion, 1995), Imperium (Havas Poche, 1999) et Ebène (Plon, 2000).

( 1 ) Flammarion, Paris, 1988.

( 2 ) Traduction française : Le Cinéma est un art, éditions de l’Arche, Paris, 1989. On lira également, de Rudolph Arnheim, La Pensée visuelle, Flammarion, Paris, 1976.

( 3 ) Lire Serge Halimi, « Un journalisme de racolage », Le Monde diplomatique, août 1998.

(Ce texte reprend, pour l’essentiel, le discours prononcé par l’auteur, le 19 novembre 1998, à Stockholm, au cours de la cérémonie de remise des prix nationaux de journalisme Stora Jurnalstpriset.)


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